Lancement officiel du Réseau économique féminin à la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon

CCI
Villeurbanne-Lyon Publié le 1 juin 2013

C’est l’invitation de Claire Saddy que j’ai lancé devant l’ensemble des représentants économique de l’agglomération lyonnaise, le Réseau économique féminin, une très belle initiative , à l’esprit innovant, qui devrait faire des émules dans d’autres régions de France. Voici le discours que j’ai prononcé, en soutien aux femmes impliquées dans tous les secteurs de l’économie, et qui s’engagent pour faire avancer la place des femmes dans les entreprises.

Monsieur le Maire du 4eme arrondissement de Lyon, Vice-Président du Grand Lyon en charge du Développement Economique, Cher David KIMEFELD,

Madame l’Adjointe au Maire de Lyon déléguée à l’égalité femmes/hommes, chère Thérèse RABATEL,

Monsieur le Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon, Cher Philippe GRILLOT,

Madame la présidente du réseau économique féminin, Chère Claire SADDY,

Madame la déléguée régionale aux droits des femmes, Elsa PALANDJIAN,

Je suis évidemment très heureuse d’être avec vous pour ce lancement d’un réseau que beaucoup attendaient: c’est une petite fierté pour moi, bien sûr, qu’une si belle idée naisse et se réalise dans ma ville.

Une fierté, mais pas une surprise: je sais trop bien le travail formidable qui est fait ici à la fois pour le développement, le dynamisme et l’attractivité économique du territoire, et pour l’égalité femmes / hommes, dans tous les domaines, notamment celui de l’égalité professionnelles dans les entreprises.

Je ne sais d’ailleurs vers qui tourner mon regard tant il me semble que chacun, chacune s’attache ici au Grand Lyon, à la Ville de Lyon, à la Région, à la CCI, dans les services de l’Etat, dans les associations… à faire ce travail main dans la main, dans un esprit de coopération tout à fait remarquable, et un naturel presque déconcertant quand on sait les résistances qui peuvent exister ailleurs dans le pays.

J’étais d’ailleurs avant hier ici même à Lyon au colloque de l’AGEFOS PME sur l’égalité comme facteur de performance et de compétitivité dans les entreprises: j’ai pu constater la mobilisation des entreprises elle-mêmes, c’est à peine si j’avais à convaincre.

Je serai aussi, et nous prenons aujourd’hui un peu d’avance, le 13 juin prochain au salon des entrepreneurs à Eurexpo avec Fleur Pellerin afin de développer une série de mesures dans ce domaine: vous me pardonnerez une certaine réserve dans ce que je vous dirai ce matin, ne serait-ce que pour libérer les esprits de celles et de ceux qui travailleront en ateliers tout à l’heure, et dont je ne voudrais surtout pas brider l’imagination, la créativité et l’audace.

L’égalité professionnelle à tous les étages, c’est en effet, vous le savez, une grande priorité de mon action au Ministère des Droits des Femmes, dans un gouvernement qui fait lui-même de l‘emploi, de l’activité économique et de la compétitivité des entreprises, une priorité dans tous les domaines de l’action publique.

La question du travail à temps partiel dans des conditions précaires ne peut pas être séparée tout à fait de celle des formations, de l’accès aux plus hautes responsabilités ou de la création d’entreprise: c’est à la place des femmes dans l’économie, en global, qu’il faut s’attaquer, sans partir du principe qu’elles seraient toujours des victimes, ou toujours des héroïnes, ou encore complémentaires des hommes, mais simplement en considérant qu’elles leur sont des égales.

J’ai constaté à la fois l’ampleur du travail qu’il restait à réaliser pour parvenir à une égalité réelle – vous connaissez les chiffres aussi bien que moi – mais aussi de très nombreuses raisons d’espérer, tant les initiatives sont nombreuses sur le terrain, et notamment dans les entreprises elles-mêmes.

Venues des femmes comme c’est le cas aujourd’hui avec le Réseau Economique Féminin, mais pas seulement… les hommes sont de plus en plus présents et actifs pour que les femmes trouvent leur juste place dans toutes les organisations, et dans l’ensemble des secteurs économiques.

David Kimelfeld et Philippe Grilllot ne font plus tout à fait figures d’exceptions… même si vous pouvez compter sur moi pour rappeler toujours qu’ils furent des pionniers.

C’est aujourd’hui une évidence de mieux en lieux partagée que la contribution des femmes à la réussite économique d’un territoire est un facteur essentiel de performance, de compétitivité et d’attractivité, mais aussi d’équilibre, de cohésion sociale et d’égalité entre les citoyens.

Les deux enjeux ne s’opposent pas l’un à l’autre, tout au contraire.

Il faut que cette réalité soit mieux reconnue, et surtout mieux soutenue et encouragée par l’ensemble des responsables publics, des partenaires sociaux, des medias et des acteurs économiques de notre pays: c’est le sens de notre présence à tous, ici, aux côtés des femmes qui ont décidé de prendre les choses en main en unissant leurs forces.

12 réseaux qui couvrent d’emblée l’ensemble des problématiques, représentant plus de 1 500 personnes, on peut dire que vous disposez dès votre naissance d’une «force de frappe» considérable à l’échelle du territoire, qui vous permettra j’en suis certaine, de vous faire entendre très au-delà… jusqu’au Ministère des Droits des femmes, en tout cas, c’est certain!

La mobilisation des acteurs eux-mêmes, en région, est en effet la première des conditions pour réussir et progresser.

La création d’entreprise, l’innovation, la création, le dynamisme de la vie culturelle et associative dans nos régions dépendent de cette mobilisation, indispensable pour faire progresser l’égalité professionnelle, dans tous les secteurs d’activité.

Une mobilisation indispensable aussi pour que les femmes prennent plus largement des responsabilités dans les entreprises, et qu’elles accèdent plus facilement à l’entrepreunariat et qu’elles toute leur part dans le défi prioritaire et majeur qui est devant nous: retrouver la croissance, créer des emplois, et sortir de la crise, dans la justice.

A l’échelle mondiale, on estime que près d’1 milliard de femmes feront leur entrée sur le marché du travail dans les 10 prochaines années : on mesure à quel point leur taux d’emploi, leur niveau de formation et leur capacité à accéder, demain, aux postes à hautes responsabilités sont des leviers décisif pour le retour d’une croissance durable, et partagée.

Un horizon prometteur, même si le constat reste assez sévère lorsqu’on regarde le tissu économique qui est le nôtre, aujourd’hui.

Il faut notamment rappeler que les femmes sont aujourd’hui encore très minoritaires à la tête de petites sociétés, PME et TPE : elles ne représentent que 30 % de la population des créateurs/repreneurs d’entreprises, et la part se réduit à 10 % lorsqu’il s’agit d’entreprises innovantes nouvellement créées.

C’est presque une spécificité française tant le décrochage entre les femmes et les hommes est plus marqué que dans d’autres pays avec moins de 3% des françaises sur la tranche d’âge 18-64 ans qui ont créé une entreprise ou étaient propriétaires d’une entreprise en France, contre 4,5% en Allemagne, 5,2% au Royaume-Uni et plus de 10% aux Etats-Unis.

On peut noter aussi que les femmes recourent moins au crédit que les hommes (37% contre 43%), surtout en raison de leurs secteurs d’activités.

Ce retard est évidemment préjudiciable aux femmes dont les perspectives professionnelles se trouvent ainsi limitées alors même qu’elles sont en moyenne à la sortie de l’université plus qualifiées que les hommes ; il est préjudiciable, bien entendu, à notre économie dont le potentiel de croissance pourrait être accru: une étude de la Commission européenne, vous le savez, estime que si le taux d’emploi des femmes était équivalent à celui des hommes, notre potentiel de croissance serait accru de 20 à 40%..

De la même façon, si nous parvenions à faire passer le taux d’entrepreneuriat féminin en de 32 % des créations à 40 % qui est un objectifs très raisonnable, on estime qu’il y aurait chaque année 249 000 entreprises créées par des femmes sous toutes leurs formes, soit 73 000 entreprises de plus qu’aujourd’hui.

Vous me direz que ce retard s’explique pour beaucoup aux obstacles à la création d’entreprise en général, et vous aurez raison, et c’est bien pourquoi le gouvernement s’attache à les lever, en stimulant la compétitivité.

Mais les femmes subissent des freins spécifiques :
– poids des stéréotypes et des préjugés ;
– absence de promotion du goût d’entreprendre et de la mixité dans le parcours d’orientation ;
– difficulté persistante d’articulation des temps de vie ;
– processus bancaires peu adaptés aux projets de reconversion professionnelle et – difficulté d’accès au crédit et aux fonds propres ;
éparpillement des dispositifs d’accompagnement…

Un éparpillement auquel le réseau qui naît officiellement aujourd’hui apporte une part de réponse très salutaire, et qui – je le souhaite – essaimera ailleurs.

Ma conviction, c’est en effet que les inégalités entre les hommes et les femmes au travail, qu’il s’agisse du taux d’emploi, de l’accès aux responsabilités, ou encore de la création d’entreprises, sont autant de pertes de chance individuelles pour les femmes concernées, mais aussi des pertes de chance pour la société tout entière, qui en est privée de leurs talents et de leur créativité.

C’est la raison pour laquelle j’ai signé il y a quelques semaines une convention avec seize des plus grandes entreprises de notre pays pour qu’elles s’engagent sur des objectifs chiffrés de féminisation de leurs comités directeurs et que nous rendrons désormais publics les résultats en la matière, c’est-à-dire la féminisation des postes de direction de toutes les plus grandes entreprises, celles du SBF 120, en l’occurrence.

Nous veillerons aussi à aller plus loin, notamment pour que les conseils d’administration puissent trouver suffisamment de femmes pour atteindre les 40 % réclamés par la loi, par exemple en stimulant des candidatures parmi les femmes chefs d’entreprise, en particulier de PME.

On peut considérer que cette question du partage des responsabilités à haut niveau est une question à part, mais je crois qu’elle joue beaucoup sur la création d’entreprises tant l’exemplarité des femmes qui réussissent est important.

C’est d’ailleurs une vertu que vous illustrez à merveille en agissant comme vous le faites, en accompagnant et montrant à d’autres que la création d’entreprise, c’est possible pour les femmes, que l’épanouissement individuel et collectif à travers la réussite professionnelle, c’est possible aussi pour les femmes.

Dans ce domaine, nous travaillons en suivant trois axes majeurs qui recoupent beaucoup des préoccupations que j’ai entendues ici:

D’abord la sensibilisation et l’orientation des jeunes filles à la création d’entreprises avec notamment une semaine annuelle qui y sera consacrée avec des femmes chefs d’entreprise qui viendront témoigner: je peux d’ores et déjà vous dire que vous serez largement sollicitées.

Ensuite un meilleur accompagnement des créatrices grâce à des services simplifiés et à un premier accueil qui répondra à leurs contraintes spécifiques ;

Enfin, il faut améliorer le financement, qui reste le nerf de la guerre, à travers notamment des interventions de la Banque publique d’investissement, de la Caisse des dépôts et consignations, et le montant du Fonds de garantie à l’initiative des femmes qui augmentera de 20 % cette année.

Je crois que Muriel Pernin, la Présidente des Atelières est parmi nous parmi tant d’autres mais dont j’ai suivi le parcours sans doute de plus près ces derniers mois : elle pourrait témoigner à la fois des difficultés, mais aussi des solutions qui peuvent être trouvées.

Il faut commencer tôt, je le disais, en inscrivant l’entrepreunariat féminin dans le nouveau parcours individuel d’information, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel.

A l’initiative du ministère du redressement productif, nous allons ainsi lancer un appel à projets sur trois ans auprès des réseaux pour promouvoir l’entreprenariat auprès des jeunes scolaires et auprès des étudiants via les 23 pôles d’entrepreneuriat étudiant en France.

C’est dans cet esprit, d’ailleurs, que nous avons organisé il y a quelques jours une semaine de sensibilisation en partenariat avec le ministère de l’éducation nationale, le ministère du redressement productif et le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, et avec plusieurs réseaux et associations (100 000 entrepreneures, France active, Fédération des pionnières et APCE).

Un dispositif que nous ferons monter en puissance en associant un cercle d’acteurs toujours plus large, et une capacité plus forte de toucher et de sensibiliser le grand public… des parents qui incitent leur fille autant que leur garçon à se lancer dans la création d’entreprises, c’est un changement des mentalités qui aide…

Car la création d’entreprise n’est pas un parcours facile, chacun le sait, et pour les femmes encore moins, notamment parce que peu de choses ont été mises en place pour faciliter et rendre plus simples le premier accueil, les premières démarches, les premiers conseils.

Un parcours plus ou moins bien pensé, bien adapté pour les femmes, d’ailleurs, selon le territoire dans lequel on se trouve, ce que je considère comme une deuxième forme d’inégalités particulièrement inacceptable, et nous ferons beaucoup d’efforts pour créer une dynamique nouvelle dans les régions, les départements et les villes qui ont pris du retard, en nous inspirant d’exemples comme Lyon, le Rhône et toute la région Rhône-Alpes qui fait figure de modèle dans les expérimentations que nous avons lancées.

Je pense en particulier au fonds de garantie à l’initiative des femmes que nous voulons mieux décliner dans les quartiers de la politique de la ville. Le FGIF crée en 1989 joue un rôle d’accompagnement qui a permis en 2012 de consolider ou créer environ 70 000 emplois.

Formation, sensibilisation, accompagnement renforcé et harmonisé, donc, mais aussi un ciblage plus attentif aux femmes des dispositifs de financement innovants.

C’est ainsi que j’ai demandé à ce que regardions comment mettre en place un fonds d’amorçage dédié à l’entreprenariat féminin qui, aujourd’hui, n’existe pas dans le paysage des outils existants, et qui fait cruellement défaut.

Un manque d’autant plus criant que les femmes, précisément, ont moins accès aux outils de financement publics. En effet, les activités qu’elles créent, souvent dans les services, ne sont pas considérées comme innovantes ou faisant appel à une importante activité capitalistique.

Voici quelques-uns des chantiers spécifiques qui sont ouverts à travers lesquels l’Etat viendra prendre sa place dans les efforts qui sont aujourd’hui menés par les collectivités locales, et les réseaux de femmes impliquées dans la vie économique, impliquées pour faire reculer les inégalités entre les femmes et les hommes dans la vie professionnelle, et la vie tout court.

Il est très important pour moi que ce travail aujourd’hui engagé se concrétise rapidement, mais reste aussi un chantier ouvert aux initiatives et aux expériences qui se réalisent chaque jour, attentif aux situations particulières qui sont d’une très grande diversité, comme en témoigne la diversité des réseaux de femmes qui rejoignent aujourd’hui le Réseau économique Féminin.
Je veux à cet égard remercier, féliciter et saluer sincèrement l’engagement de Claire Saddy, infatigable et d’une énergie qui semble inépuisable, car cette fédération de réseaux répond à un besoin bien identifié de mieux regrouper les efforts et sans aucun doute aussi, de faciliter le dialogue et le travail avec les responsables publics.

J’aurais aimé pouvoir participer aux travaux qui vont avoir lieu dans le cours de la matinée car je sais que c’est de ces échanges au plus des difficultés très concrètes éprouvées par les unes et les autres que se trouvent les meilleures solutions: les plus simples, les plus efficaces et bien souvent les moins couteuses pour l’argent public aujourd’hui si rare.

Mais je sais que je peux compter sur elle comme sur vous toutes et tous pour m’en faire part en Lyonnaise autant qu’en Ministre à Paris: soyez assurés que j’y serai très attentive, et que j’aurai à coeur de vous aider à les faire valoir.

Je sais aussi que nous aurons d’autres rendez-vous très vite, et pas plus tard que dans 15 jours pour le salon des entrepreneurs.

Une occasion de montrer une nouvelle fois que le modèle lyonnais, aujourd’hui regardé de très loin pour ses réussites, se décline aussi au féminin.

Je vous remercie.