Remise des Trophées EducNum à la CNIL

Éducation nationale Publié le 28 janvier 2015

Ce mercredi 28 janvier 2015, Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur, de la Recherche, a remis les Trophées EducNum lors d’une cérémonie qui s’est déroulée à la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL), en présence de Jacques-Antoine Granjon, co-fondateur de l’EEMI, PDG de vente-privee.com, de Claudie Haigneré, présidente d’Universcience et d’Isabelle Falque-Pierrotin, Présidente de la CNIL.

Retrouvez ici le discours prononcé par la ministre.

Seul le prononcé fait foi.

Madame la Ministre, Chère Claudie Haigneré,
Madame la Présidente de la CNIL
 et Présidente du jury, chère Isabelle Falque-Pierrotin,
Monsieur le Président Directeur Général, [Jacques-Antoine Granjon, PDG de vente-privée.com]
Mesdames et Messieurs,
Chers candidats et lauréats des Trophées EducNum,

Il existe un point commun entre ceux qui considèrent qu’il ne s’est rien passé le 11 septembre 2011, ceux qui pensent que le virus du sida a été créé par l’Homme pour lutter contre la surpopulation ou ceux qui sont convaincus que les Illuminati contrôlent la planète : ils s’informent tous sur internet.

Parmi ceux qui croient à de telles histoires, ou, beaucoup plus grave, qui croient à toutes ces histoires, qui sont en proie à une véritable « mentalité du complot »,il y a des enfants et des adolescents, peu armés pour faire la part des choses face à un monde complexeLes informations, les bruits, les rumeurs leur parviennentpar flux, de toute part, par l’intermédiaire des médias, bien sûr, mais aussi et surtout par l’intermédiaire des moteurs de recherche et des réseaux sociauxqu’ils fréquentent assidûment. Ce sont ces mêmes enfants, ces mêmes adolescents qui souvent ne pensent pas à protéger leurs données personnelles sur le web et peuvent, parfois, se mettre en danger.

Il est de notre rôle d’éduquer nos enfants au numérique, et c’est la raison de notre présence ici.

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Éduquer au numérique, c’est d’abord transmettre de nouvelles compétences.

De nouvelles compétences parce que le numérique, ne l’oublions pas, est un vecteur de progrès exceptionnel et de transformation de la société ; et l’éducation au numérique porte en elle la mission et l’espoir de permettre au plus grand nombre de profiter de ce progrès, au premier rang desquels les jeunes publics

Le collectif « éducation au numérique » et plus particulièrement la CNIL ont pleinement pris la mesure de ces enjeuxdont l’éducation nationale a fait une priorité pour la refondation de l’école : nous devons demain dispenser une éducation au numérique qui permette l’acquisition d’une culture générale du numérique, la compréhension des fondements de la programmation informatique, le développement de capacités de raisonnement nouvelles, la maitrise d’une véritable civilité numérique.

Oui, il est utile pour un enfant d’acquérir une « culture numérique » pour pouvoir penser, agir, exercer sa citoyenneté, travailler dans une société toujours plus connectée. Cette culture est essentielle, aussi, pour lui permettre de développer un rapport à la lecture et à l’écriture adapté au numérique. Cela ne remet d’ailleurs pas en cause l’apprentissage du geste de l’écriture manuscrite.

Oui, l’initiation à la programmation informatique est nécessaire, et doit amener les enfants et les adolescents à ne pas se penser uniquement comme des consommateurs du numérique, mais aussi comme des acteurs et des producteurs du numérique

Oui, l’éducation au numérique et à l’informatique développe chez les enfants des compétences cognitives différentes et complémentaires de celles qu’apportent les autres enseignements. Elle permet aux élèves d’accéder à un raisonnement procédural, par strates d’informations et d’instructions, qui constitue une forme de pensée particulière et offre des éclairages nouveaux pour résoudre les problèmes.

Oui, le numérique renouvelle la question de la civilité. Quelle image est-ce que je choisis de donner de moi en ligne ? Comment est-ce que je me comporte sur les réseaux sociaux ? L’école doit constituer au développement d’un nouveau savoir-vivre, d’un nouveau savoir-être.

Cette priorité pour l’éducation au numérique sera pleinement traduite dans le grand plan numérique pour l’éducation annoncé par le Président de la République, et dont il m’a confié la responsabilité.

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Mais notre priorité pour l’éducation au numérique doit être d’apprendre aux jeunes à se préserver d’utilisations qui puissent les exposer au danger, au mensonge, à l’ignorance. Leur apprendre à trier l’information de la désinformation, à rester libres face à la manipulation, à protéger leur sphère intime, et particulièrement leurs données personnelles, des regards curieux et parfois mal intentionnés

C’est l’une des leçons que nous devons retenir des attentats, de la diffusion de théories du complot qui s’est ensuivie et des commentaires qui ont circulé sur internet et sont susceptibles d’attirer les jeunes dans des raisonnements obscurantistes.

Car le numérique, au-delà des progrès qu’il apporte, se traduit aussi par un accès aux informations et à leur commentaire presque immédiat, qui change en profondeur le rapport à l’actualité, et donc le rapport au monde et le rapport aux autres. La messagerie, les forums, les blogs, mais surtout les réseaux sociaux permettent une diffusion extrêmement rapide, et à grande échelled’absolument tout. Cela traverse les canaux les plus divers, que chacun est libre de créer et d’entretenir.

Les sources d’information se sont démultipliées. Les grands médias,concurrencés par une profusion de nouveaux médias en ligne, parfois de simples blogs, perdent de leur valeur de référenceL’ensemble des informations auxquelles on accède déjà sur les réseaux sociaux, par l’intermédiaire de ses pairs, remet en cause la fonction même de médias de masse traditionnels.

Dans ces conditions, la fiabilité des informations diffusées sur Internetpar nature très inégale compte tenu de la variété des acteurs qui les produisent et les relaient, devient un enjeu de premier ordre.

Je ne vous citerai qu’un chiffre, avancé par le dirigeant de Hoaxbusterun site qui chasse les canulars en ligne : entre 10 % et 20 % des messages postés seraient des canulars, quel que soit le vecteur de transmission. Surtout, Internet offre à peu de frais la possibilité d’une désinformation active, intentionnelle,puissante, et les canulars en ligne prennent depuis quelques années une tournure toujours plus politique et toujours plus sociale. Près de 50 % des rumeurs identifiées et démenties par Hoaxbuster auraient désormais trait à l’islam.

C’est notamment à la lumière de ce constat que j’ai souhaité que l’Ecole se mobilise après les évènements de début janvier. L’école doit contribuer à éclairer les esprits, à défaire les fantasmes, à forger des convictions étayées et bien sûr à inculquer des valeurs républicaines. Je l’ai annoncé la semaine passée, nous allons mettre en place un nouveau parcours éducatif, qui sera un parcours citoyen et comprendra un volet important consacré à l’éducation aux médias et à l’information à l’heure du numérique.

Cette éducation aux médias et à l’information  traversera les disciplines. Dans chaque établissement, les élèves pourront participer à créer eux-mêmes un média, qu’il s’agisse d’un journal, d’une radio, d’un blog, d’une plate-forme collaborative en ligne, pour s’approprier les enjeux de la fiabilité et de l’interprétation des informations.

Et parce qu’il ne peut y avoir, derrière chaque élève, un enseignant ou un parent pour vérifier son activité numérique, nous avons la responsabilité collective, en tant qu’adultes, d’apprendre aux jeunes à protéger leur liberté, à travers des principes simples. Les 10 conseils-clés de la CNIL produits pour « rester nets sur le web » vont dans ce sens, et j’en remercie chaleureusement vos équipes. Réfléchir avant de publier un « statut Facebook », ne pas fournir toutes ses informations privées aux réseaux sociaux lors de l’ouverture d’un compte, choisir des mots de passe réellement protecteurs : ce sont là quelques uns de vos conseils prodigués aux jeunes pour gérer leur « identité numérique » et disons-le, ces conseils pourraient tout aussi bien être utiles à bon nombre d’entre nous ici.

Ces actions que nous déployons, chacun à notre place, sont utiles. 

Mais avez-vous le sentiment, pour autant, que les politiques publiques que nous mettons en place, que les  dispositifs de protection que nous avons collectivement pensés sont encore adaptés ?

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C’est avec cette intuition qu’il nous faut inventer de nouvelles idées, tracer de nouveaux chemins pour toucher les enfants et les adolescents avec les outils qu’ils comprennent, que vous avez créé, en octobre dernier, les Trophées EducNum, pour récompenser les actions pédagogiques innovantes qui permettent de sensibiliser les plus jeunes au bon usage du web.

Vous l’avez fait d’une manière fine, en choisissant la sensibilisation des plus jeunes par les aînés. 

Merci aux étudiants qui ont fait parvenir leur projet, bravo à vous. Vous avez le plein soutien de mon ministère dans votre démarche.

Les pôles étudiants pour l’innovation, le transfert et l’entrepreneuriat  (les PEPITE), que nous avons créés dans chaque grand site universitaire, sont à votre disposition au sein des universités pour vous accompagner, bénéficier de coachs, accéder à des ressources ou tester vos projets en incubateur. Mes équipes pourront assurer le lien à cet effet.

Avant de remettre les prix, je voudrais m’adresser plus particulièrement aux 6 Lauréats en les félicitant pour leur créativité et l’inventivité des deux projets qu’ils ont présentés et qui ont su convaincre le jury. De la pomme de terre « Prince Chip » qui explore les risques liées à la protection de la vie privée sur internet et notamment aux risques d’usurpation d’identité ; à la mystérieuse plateforme Datafiction qui propose d’incarner des personnages à travers des histoires interactives, vous avez su transformer vos idées en projet concret et le faire dans un souci de transmission aux plus jeunes générations. Cela traduit de votre part un réel sens de l’engagement. Je vous en remercie.

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Transmettre des compétences nouvelles, mais aussi apprendre aux jeunes publics à se protéger, et particulièrement à protéger leurs données personnelles ; c’est tout l’enjeu, me semble-t-il, d’une large diffusion de l’éducation au numérique dans le contexte faisant suite aux attentats dans lequel nous nous situons.

Une éducation au numérique qui ne soit pas construite avec les outils et les modes de pensée d’hier, mais avec des outils innovants tels que ceux que nous proposent les lauréats de ces Trophées.

Une éducation au numérique qui soit élaborée en mettant autour de la table les acteurs traditionnels, mais aussi les réseaux sociaux, les grands moteurs de recherche.

Bravo, donc, à Valentin LE MEN, Laurie GUEGUEN, Marine BÉGUÉ et Pacôme HENRY, de l’Université Panthéon-Sorbonne.

Félicitations également à Thomas THIBAULT et Nolwenn MAUDET, de l’École Boulle.

Quelque chose me dit que les projets  que vous avez présentés dans le cadre de ces Trophées ne sont pas les derniers, et que vous avez en réserve de nombreuses idées qui sont, pour nous tous, porteuses d’espoir sur notre capacité à renouveler les moyens d’éclairer et à la fois de protéger les jeunes publics à l’heure du numérique. 

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Un commentaire sur Remise des Trophées EducNum à la CNIL

  1. LANCIEN Dominique

    Un retard considérable à rattraper et anticiper ! Voilà ce que font M. Hollande et tous(tes)ses Ministres depuis Mai 2012. Ce que malheureusement trop de Français(es) ne comprennent pas et ne voient pas!!! Pourtant,tout ce travail est indispensable pour redresser Notre France! J’ais d’autant plus d’admiration en vers M. Hollande et TOUS(TES) ses Ministres,que toutes ces actions ne portant leurs Fruits que trop lentement,il serait insultant d’accuser tous ces Gens de ne penser qu’à 2017 !!! Même si évidemment,je compte bien qu’ILS ELLES soient réélus!

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