Discours à la journée “Ma République, c’est l’Égalité” des Jeunes Socialistes

Éducation nationale Publié le 2 juillet 2016

Ce samedi 2 juillet 2016, Najat Vallaud-Belkacem est intervenue pour ouvrir la journée de travail “Ma République, c’est l’Égalité” des Jeunes Socialistes à Paris. Retrouvez ici son discours.

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Monsieur le président, cher Benjamin Lucas,
Madame la présidente d’Osez le Féminisme, chère Claire Serre-Combes,
Monsieur le président d’Homosexualité et Socialisme, cher Denis Quinqueton,

Mesdames et messieurs,

Chers jeunes socialistes, chers camarades,


Liberté, égalité, fraternité, telle est la devise de la République.

Si vous regardez un instant cette devise, vous constatez une chose : c’est que l’égalité est au centre.

Liberté, égalité, fraternité.

Ces trois mots, en s’enchaînant, nous décrivent aussi une logique : c’est que l’alliance de la liberté et de l’égalité fonde la fraternité. La liberté sans égalité, c’est le champ libre laissé aux inégalités, aux injustices, et à la loi du plus fort.

C’est par l’égalité que se forgent les liens qui aboutissent à la fraternité. Une relation sans égalité est un asservissement, une soumission, une domination : ce qu’elle établit est forcément fragile, éphémère.

L’égalité est un pilier de notre République. Elle est centrale, et ce n’est pas un hasard si elle apparaît dès le premier article de la déclaration des Droits de l’Homme et Du Citoyen.

Si je rappelle cela, c’est pour vous faire partager un étonnement. L’égalité est partout dans les textes qui fondent notre République. L’égalité est inscrite au fronton de chacun de nos monuments, de chacune de nos institutions.

Alors, pourquoi ce mot déchaîne-t-il tant de passions, tant de violence, dès que l’on veut agir, non seulement en son nom, mais pour aboutir à l’égalité dans les actes, à l’égalité dans les faits ?

Oui, l’égalité soulève les passions, mais, malheureusement, pas dans le bon sens du terme. Ce ne sont plus des passions généreuses, mais la passion du chacun pour soi, du chacun chez soi.

Vous parlez d’égalité entre les femmes et les hommes à l’Assemblée ? Des gloussements raffinés et distingués se font entendre !

Vous parlez d’égalité dans les droits, et instaurez le mariage homosexuel : les propos les plus honteux résonnent dans l’hémicycle !

Vous parlez d’égalité au sein de notre Ecole, alors, immanquablement, reviennent les accusations de nivellement par le bas, et de haine du mérite !

Vous parlez d’égalité, sans distinction d’origines ou de couleurs de peau, et l’on vous accuse d’angélisme et de naïveté, quand ce n’est pas de haute trahison !

Mais où est la trahison ? Qui ne cesse d’oublier que l’égalité est au cœur de la démocratie, comme de la République ?

On me taxe, bien souvent, d’égalitarisme. On me reproche de vouloir toujours plus d’égalité, en faisant semblant d’opposer égalité et équité.

Mais, au fond, qui a la passion d’un égalitarisme dévoyé ? Qui méconnaît le plus la singularité des personnes et des situations ?

Ceux qui considèrent que le seul fait de naître est un gage d’égalité, et qu’à partir de là il n’y a pas à tenir compte des déterminismes économiques et sociaux ?

Ou ceux qui considèrent que, oui, l’endroit où l’on naît, le milieu dans lequel on naît, a des conséquences, et qu’il faut en tenir compte ?

C’est une époque étrange que nous vivons. Inquiétante aussi. Quand un principe aussi fondamental a besoin d’être rappelé – et vous avez raison d’insister sur ce point avec cette campagne « Ma République c’est l’égalité ! » – c’est que quelque chose ne va plus.

Oui, apparemment, il y a un problème avec l’égalité. Pour une raison simple : c’est que vouloir l’égalité, c’est forcément s’attaquer aux inégalités.

Et comme personne n’osera clairement affirmer sa préférence pour l’inégalité, alors, hypocritement, on vous traite comme si l’égalité était la pire des choses ; comme si l’égalité, pour laquelle des femmes et des hommes se sont battus et sont mort au fil des siècles, pour laquelle des femmes et des hommes continuent de se battre aujourd’hui, comme si cette égalité, au lieu d’être une fierté, devait être une honte !

Eh bien, je vous le dis, moi, ici, devant vous : jamais je n’aurais honte de me battre pour l’égalité !

C’est pour cela qu’il que je suis heureuse d’être ici, avec vous, qui l’affirmez haut et fort, et je veux le dire avec vous : oui, ma République, c’est l’égalité !

Car sans l’égalité, alors c’est la République qui devient un mot vide, un mot creux, un mot qui en somme n’engage à rien !

L’égalité, il faut l’affirmer, il faut l’enseigner, il faut la revendiquer.

L’égalité, il faut la faire, il faut la soutenir, il faut l’instaurer.

L’égalité, voilà un combat qui mérite d’être mené !

Tels sont les trois piliers sur lesquels reposent mon action à la tête du ministère de l’Education Nationale, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.


Dire l’égalité, au sein de nos écoles, l’enseigner, c’est, aujourd’hui, une urgence.

Nos élèves, dès qu’ils quittent l’Ecole sont soumis, dans notre société, à des discours délétères, qui résonnent de plus en plus fortement, qui prennent de plus en plus d’ampleur :

Il y a des discours qui vantent les mérites de l’inégalité, et appellent assistanat ce qui relève de la justice !

Il y a des discours de haine, qui fleurissent sur les égoïsmes et le refus des différences !

Il y a des discours intégristes, qui remettent en question l’égalité entre les femmes et les hommes, et qui considèrent l’homosexualité comme une aberration !

Voilà les discours qui s’affichent de plus en plus ouvertement, de plus en plus explicitement !

Et nous les laisserions prospérer sans rien faire ? Sans porter, en face, un discours clair, en faveur de l’égalité ? Sans rappeler à nos élèves qu’elle est une valeur essentielle, sans laquelle nous sommes voués à vivre les uns à côté des autres, mais jamais réellement ensemble ?

L’Ecole est fondée sur cette idée d’égalité. Si nous n’assumons, pas dans cette institution, un discours clair, ce serait une trahison à l’égard de la République. Nous prenons donc soin de rappeler, à nos élèves, ce principe fondamental.

Pour que l’égalité ne soit plus, pour nos élèves, pour notre avenir, un sujet de division, mais bien une évidence !

Voilà pourquoi nous avons instauré le parcours citoyen ! Et porter, au sein de l’Ecole, un discours clair sur l’égalité, c’est aussi refuser de laisser passer toutes les remarques racistes, homophobes, sexistes et antisémites.

Certains déclarent : mais ce ne sont que des mots ! Mais nous savons que les mots blessent, que les mots tuent ! Nous savons aussi que la frontière est ténue, entre les paroles et les actes.

Voilà pourquoi j’agis contre le harcèlement, qui fait de notre diversité qui un prétexte à persécution !

Car l’égalité ce n’est pas l’uniformité, mais le respect de nos singularités. L’égalité, c’est rassembler et unir autour des mêmes droits, autour des mêmes valeurs.

Ce discours, nous le portons, au cœur de nos écoles. Et, bien sûr, il y a encore beaucoup à faire, dans bien des domaines.

Beaucoup à faire, par exemple, pour rappeler que, oui, il y a eu des femmes qui ont écrit, et, il y en a encore aujourd’hui ! Oui Marguerite de Navarre, Duras, Madame de Lafayette, ou Georges Sand valent la peine d’être lues et commentées dans le cadre du baccalauréat !

Oui, notre histoire, c’est aussi l’histoire coloniale, l’histoire de l’immigration, et que c’est une histoire que nous devons aborder dans toutes ses dimensions, avec tous ses enjeux.

Mais il ne suffit pas de le dire, d’enseigner, et de défendre l’égalité dans les paroles. C’est important bien sûr. Mais ce sera vain, si nous n’agissons pas concrètement, sur le terrain.

L’École est ouverte à toutes et à tous, et c’est une chance immense ! Mais nous devons aller plus loin. Beaucoup plus loin.

Je connais bien l’argument de celles et ceux qui veulent surtout que rien ne change, tant l’inégalité leur profite. Je l’entends souvent.

On s’approche de vous, très doucement, et puis l’on vous déclare : « Mais, madame la ministre, voyons, il y a l’égalité des chances. Et puis, tout le monde peut entrer dans l’Ecole. Tout le monde peut avoir accès à l’enseignement supérieur. Les portes sont ouvertes. Donc, de quoi vous plaignez vous. Nous sommes justes. »

Un tel raisonnement, repose, au mieux, sur de l’aveuglement, au pire, sur de l’hypocrisie.

Il n’y a pas besoin de regarder très loin, pour constater que la question de l’égalité ne se résume pas à une question d’accès.

C’est très bien d’ouvrir les portes.

Seulement, si vous ouvrez une porte au sixième étage, et que vous omettez de construire un escalier, ou de mettre un ascenseur, cela ne dérange pas celles et ceux qui sont au sixième étage, mais vous admettrez que cela ne change pas grand-chose pour ceux qui sont au rez-de-chaussée.

Vous pouvez bien leur crier, depuis une fenêtre  « allez, c’est juste une question de volonté et de mérite, mettez-y du vôtre ! »

Mais dans les faits, vous vous aveuglez devant une situation. Vous préférez prétendre qu’il n’y a rien à faire de plus, que la porte est ouverte et que le reste n’est pas de votre ressort.

Je refuse de considérer les inégalités comme une fatalité, contre laquelle on ne pourrait rien faire. L’idée de fatalité est profondément contraire, non seulement à l’idée de progrès qui anime notre République, mais au sens même de la politique.

Si nous agissons, de façon concertée, alors, oui, nous pouvons progresser. Et croyez moi, c’est ce que nous avons fait, pendant toutes ces années, mes prédécesseurs et moi-même.

Et l’action ne demande qu’une chose : être lucide sur la réalité des situations que nous connaissons à l’école. Non, le capital culturel, le milieu économique et social ne sont pas des abstractions !

Entre deux élèves, l’un qui a la chance d’être dans un milieu favorisé, et l’autre qui ne l’est pas, la réalité me dit que, pour le premier,  la scolarité s’apparentera à un 100 m, quand l’autre est un train de courir un marathon.

Et il n’y a pas besoin d’être un spécialiste des probabilités pour comprendre cela !

Par contre, pour oser dire que les déterminismes économiques et sociaux et les discriminations ne pèsent pas tant que cela, il faut n’en avoir jamais souffert !

Parce que, oui, cela pèse. Cela vous ronge. Cela vous occulte bien des perspectives, et cela nourrit de l’autocensure.

« Ce n’est pas pour moi !»

Combien d’élèves ont, dans un coin de leur esprit, cette petite phrase ? Et si vous leur demandez, ils seraient incapable de vous dire précisément où ils l’ont entendu. Mais c’est que tout, dans leur environnement quotidien, dans les discours qu’ils entendent, dans ce qu’ils voient, leur rappelle cela ! « Ce n’est pas pour toi ! »


Nous avons donc agi, avec un principe simple : être inégalitaire dans la répartition des moyens, pour être égalitaires dans la réalité.

Voilà pourquoi nous avons refondu la carte de l’Education Prioritaire.

Celle-ci n’a de sens que si elle correspond, sur le terrain, à une réalité.  Or, sur le terrain, les choses changent. Les situations peuvent s’améliorer ou se dégrader.

En tenir compte, c’est déjà se donner les moyens d’agir là où c’est le plus nécessaire. C’est concentrer les moyens humains et financiers vers les territoires qui en ont le plus besoin.

Et c’est bien pour cette raison que cette carte sera régulièrement, tous les 4 ans, mise à jour.

A la rentrée 2014, nous avions déployé 102 réseaux d’établissement prioritaires +. En 2015 ? 1089 dont 350 REP+.

Derrière ces sigles, il y a des établissements. Il y a des élèves. Il y a des enseignants. Et nous les soutenons, parce qu’ils sont confrontés à des difficultés qu’il serait irresponsable d’ignorer.

En 2015, 352 millions d’euro supplémentaires ont donc été attribués à l’éducation prioritaire. Et des moyens humains et des dispositifs spécifiques ont aussi été mis en place.

C’est, par exemple, le « Plus de maîtres que de classes ». Cela signifie que si vous avez 4 classes, au primaire, eh bien vous avez 5 professeurs. Le cinquième a justement vocation à pouvoir intervenir en soutien, à pouvoir aider, en cas de difficulté, notamment dans l’apprentissage des fondamentaux.

Le souci de l’égalité, c’est aussi ce qui m’a amenée, dès décembre 2014, à réformer l’allocation des moyens, une mesure entrée en vigueur dès la rentrée 2015.

Avant, les moyens étaient attribués principalement sur un critère démographique. Plus d’élèves, alors plus de moyens. Moins d’élèves, alors moins de moyens.

Nous avons ajouté, à ce critère, des critères sociaux, notamment sur les revenus des familles, et territoriaux. Avec un seul souci : agir véritablement contre les inégalités. Donner les moyens, là où il est le plus urgent de le mettre.

Une politique véritable en faveur de l’égalité ne peut jamais s’élaborer en dehors du terrain. L’égalité n’est pas hors-sol ! Elle n’est pas abstraite ! C’est un sujet concret, qui exige une réaction concrète !

L’Education, en France, a beau être Nationale, cela ne doit jamais être un prétexte pour s’aveugler sur les réalités locales.

Je prendrai un exemple : celui de la Seine Saint Denis.

La précédente majorité avait pensé utile de faire des économies en réduisant le nombre d’enseignants.

C’est, déjà, une idée intéressante : enseigner moins pour économiser plus, c’est sacrifier l’avenir au bénéfice d’un profit présent pour le moins aléatoire.

Résultat, dans des départements durement touchés par ces mesures comme la seine Saint Denis, dans des départements fragilisés, les premières rentrées du quinquennat ont été rudes, provoquant notamment de la part des parents et des enseignants des réactions de colère bien compréhensibles.

J’ai tenu à ce que cette colère soit non seulement entendue, mais à ce que les causes de celle-ci soient résolues.

Pour toutes ces personnes, pour les parents, pour les enseignants et pour les élèves, comment voulez-vous que le mot de République et de service public ait un sens, si on se contente d’une visite éclair, au pas de course, et que rien ne suit ?

Il y a pire que l’abandon. C’est la trahison des espoirs que l’on fait naître.

Voilà pourquoi mon écoute s’est prolongée dans l’action, avec la mise en place d’un plan de plusieurs mesures, qui ont toutes été appliquées. Et savez-vous quel a été le résultat ? Une rentrée 2015 non seulement apaisée, mais réussie.

Réussie, parce que tout simplement, il y avait, dans chaque classe, un enseignant. Les parents, les élèves, les écoles n’ont plus eu le sentiment d’être à part : ils ont eu le droit à une rentrée normale.

La droite nous dit qu’un tel plan n’a pas de sens, que c’est une exception scandaleuse ? Le vrai scandale, c’est la situation que vivent ces personnes au quotidien.

L’Egalité ne doit pas être un vain mot. « Faire des égaux », cela suppose de vaincre les inégalités sur le terrain.

Alors, contre cette politique, certains vont défendre le mérite, en montrant que tel élève, issu d’un milieu défavorisé, a réussi.

Combien de fois ai-je entendu « Mais voyons, comment osez-vous dire que l’Ecole est inégalitaire, avec votre parcours ? N’êtes-vous pas la preuve vivante du contraire !? »

Si je n’aime pas évoquer mon cas personnel, c’est justement parce que je refuse d’être un alibi pour celles et ceux qui voudraient que rien ne changent. Je sais ce que je dois à l’Ecole.

Je sais ce que je dois aux associations, animées par cette belle ambition de l’éducation populaire.

Oui, je suis une enfant de l’Ecole de la République et de l’Education Populaire.

Mais mon propre parcours, s’il me réjouit, naturellement, ne m’aveugle jamais. Je ne me berce pas d’illusions.

L’égalité, ce n’est pas voir deux ou trois exceptions, ici ou là, de temps en temps, et les applaudir très fort et très longuement en espérant masquer le fait que ce ne sont que des exceptions !

La chance que j’ai eue, je sais qu’elle contraste avec le vécu de la majorité de celles et ceux qui étaient avec moi sur les bancs de l’école. Je ne les oublie jamais.

Et ce refus d’oublier, ce refus de considérer que tout cela n’est qu’affaire de volonté, et fermer les yeux sur tout ce qui entrave ces élèves, je sais qu’il nous unit, chers camarades !

Oui, nous refusons, devant des études comme celle de la DEPP parue le 21 juin dernier, qui souligne encore le poids du milieu social, économique et culturel sur les résultats scolaires, de nous dire : « A quoi bon ? » ; « Qu’y pouvons-nous ? ».

Et quelle ironie – tragique – que de voir, le jour même de la publication de cette étude, qui montre la profondeur de la corrélation entre réussite scolaire et origine sociale, monsieur Laurent Wauquiez faire voter une enveloppe de 3 millions d’euros aux élèves qui en ont le moins besoin, en pure perte, et en se vantant d’attribuer des bourses « sans conditions de ressources » !

Comme si la cécité était une vertu !

Oui, le jour où l’inconscience devient une qualité politique, il est urgent de rappeler ce que signifie agir, véritablement, politiquement, pour davantage de justice, davantage d’égalité, et cela passe aussi par la mixité sociale.

Nous avons en France des phénomènes graves de ségrégation sociale et de ségrégation scolaire.

Oh, je sais que la droite n’aime pas que l’on parle de ségrégation. Leurs oreilles sont apparemment plus sensibles que leurs yeux !

10% de nos collèges (700) comptent moins de 6% de collégiens d’origine sociale défavorisée. A l’inverse, plus de 82% de collégiens d’origine sociale défavorisée sont scolarisés dans 10 % seulement des collèges !

Voilà pourquoi je n’ai pas peur de parler de ségrégation sociale ou scolaire ! Tout autre mot serait bien en dessous de la vérité.

Voilà pourquoi la loi du 8 juillet 2013 pour la Refondation de l’Ecole avait confié une nouvelle mission au service public de l’éducation : veiller à la mixité sociale dans ses établissements.

Cette mission, la mobilisation de l’Ecole pour les valeurs de la République française comme les conclusions du comité interministériel « égalité » citoyenne du 6 mars 2015 en ont encore renforcé l’importance, faisant de la mixité sociale un objectif majeur de l’action gouvernementale.

J’ai donc souhaité mener une véritable politique pour favoriser celle-ci. C’est  une tâche difficile. Difficile, car la mixité sociale ne se décrète pas. Elle ne s’impose pas.

Elle se construit, elle s’élabore, patiemment, en concertation avec l’ensemble des personnes concernées, depuis les personnels de l’éducation nationale jusqu’aux élèves et à leurs familles, naturellement, en passant par tous les acteurs susceptibles d’être mobilisés sur le terrain.

C’est le territoire qui doit être à l’origine de notre action. C’est de lui que viendront des solutions concrètes.

Aujourd’hui 25 territoires pilotes, 22 départements et 16 académies, sont engagés dans une démarche en faveur de la mixité sociale. Saviez-vous quel était notre premier objectif, sur ce sujet ? avoir 10 territoires pilotes. Nous en avons plus du double.

Ceci prouve une chose : la mixité sociale n’est pas un sujet accessoire. Il y a, de la part des collectivités, un véritable désir de s’engager pour la faire aboutir.

Au-delà des postures de principe, chacun sent bien, aujourd’hui, que la situation dans laquelle nous sommes n’est plus tenable.

Et en parlant de posture de principe, je tiens aussi à rappeler quelques faits concernant le décrochage.

Vous avez sans doute entendu certains se récrier devant ce qu’ils appellent « la prime au décrochage », qui est une prime au « raccrochage », et qui surtout s’insère dans un plan d’ensemble pour vaincre ce fléau.

Permettez-moi de dire une chose : « Chaque décrocheur aura un parcours d’insertion qu’on va contractualiser avec lui, associant droits et devoirs. On financera le parcours, mais lui il assurera ses obligations. »

Cette formule n’est pas de moi. Elle est de Nicolas Sarkozy, à Avignon le 29 septembre 2009.

Quand on veut redonner du crédit à la vie publique, on commence par ne pas retourner sa veste à la moindre occasion et caricaturer les mesures qu’on a voulues par le passé. D’ailleurs, cette mesure n’a jamais vu le jour, et cet éclair de lucidité est resté sans suite.

La mienne demeure. Si nous parvenons à faire raccrocher un élève, oui, nous lui donnons une bourse sur critère social pour l’accompagner. Pourquoi ? Parce qu’un décrocheur, contrairement aux fantasmes de certains, ne mène pas la belle vie ! Au décrochage scolaire, s’ajoute souvent un décrochage social, familial, affectif et économique.

Le décrocheur est souvent dans une situation précaire, il vit généralement de petits boulots. Dès lors, si c’est un obstacle financier qui s’oppose à son retour à l’école, alors, oui, je le dis clairement, je préfère, lui verser cent euros tous les mois pour qu’il achève cette formation.

Ne pas aider les décrocheurs, c’est un cas de non-assistance à jeunesse en danger. Rien de moins.

Quel serait un pays qui se désintéresse de voir sortir de son système scolaire un jeune ? Je m’y refuse. Et je m’y refuse d’autant plus que les premiers résultats sont là.

Il y 5 ans ils étaient près de 140 000 à sortir chaque année du système éducatif sans qualification, ils sont aujourd’hui 110 000 !

Oserais-je le dire ? ça va mieux ! Y compris pour les étudiants.

Nous avons augmenté le nombre d’étudiants boursiers. Et ces bourses, au risque de surprendre M. Wauquiez, assez étonnement, oui, nous les attribuons en tenant compte des ressources financières de chacune et de chacun.

Parce que oui, dans bien des situations, 100 ou 200 euros supplémentaires, cela fait la différence !

Un seul exemple : le taux de réussite en Licence est supérieur de 8 points pour un boursier par rapport à un non-boursier.

Pour une raison simple : étudier, cela demande du temps. Cela demande de pouvoir travailler dans de bonnes conditions. Cela, c’est du concret.

Et c’est à ce niveau-là que nous avons agi, en créant la caution locative étudiante, pour permettre aux étudiants de dépourvus de garants personnels d’accéder plus facilement à un logement.

D’autant que l’on connaît le cycle par cœur : pour avoir un logement, il faut avoir un travail. Mais pour avoir un travail, il vous faut un logement, et il vous faut un diplôme. Or, pour avoir un diplôme, il faut avoir le temps d’étudier.

Bref, plutôt qu’admettre ces logiques absurdes, nous avons décidé d’intervenir pour que la vie étudiante s’améliore concrètement.

Concrètement, cela veut dire qu’en 3 ans, le nombre d’étudiants boursiers a augmenté.  Il s’élève aujourd’hui à 682 195 en 2015-2016, ce qui porte le taux de boursiers à 35,9 %, soit + 8,3 % en trois ans.

Concrètement, cela veut dire que depuis 2012, notre action en faveur des étudiants représente un investissement de plus de 500 millions d’euros, auxquels vont s’ajouter 120M€ dès la fin 2016, à la suite des mesures annoncées le 11 avril dernier.

C’est un investissement sans précédent depuis plus de 15 ans.

Je vous laisse faire le calcul, mais il y a là quelque chose qui me dit que oui, au parti socialiste, on a une certaine conception de la lutte pour l’égalité, et que l’on sait que cela demande bien sûr des mots forts, mais aussi des moyens, mais aussi des actes !

Si ma République, c’est l’égalité, ma politique aussi, c’est l’égalité !

Et l’égalité, nous le savons, n’est malheureusement pas, contrairement à ce que certains essaient de faire croire, un combat obsolète. Il est d’une actualité brûlante.

Et dans ce combat nous devons agir aussi au niveau des idées.

Aujourd’hui, dès que vous parlez d’égalité, la plupart des gens considèrent cela comme un danger, ou bien ils pensent que cela ne les concerne pas.

J’ai été, vous le savez, ministre des droits des femmes, un ministère qui avait, soit-dit en passant, disparu sous la droite.

Très souvent, quand je faisais part de l’importance de cette question, de l’importance de cet enjeu, savez-vous la réponse que je m’attirais invariablement, et que j’entends encore trop souvent aujourd’hui :

« Mais c’est normal, vous êtes une femme ! ».

Et vous devinez, je pense aisément, la réponse que l’on me fait, quand, par exemple, j’insiste sur la question du racisme et de la discrimination.

Vous le voyez,  je suis prédisposée à avoir des petites lubies sur ces sujets, mais sincèrement, cela ne regarde pas les autres. C’est mon petit combat à moi. C’est notre petit truc, à nous. On aime bien se battre pour nos droits, curieusement, mais surtout, n’allez pas vous sentir concernés.

Voilà le discours que certains aimeraient faire passer. Comme si nous étions des espèces de lobbys. Comme si cette question ne relevait pas de la justice, et ne concernait pas l’ensemble de la société.

C’est pour cela qu’il est important de le marteler : l’égalité, ce n’est pas un sujet pour quelques-uns ! C’est bien une question qui doit toutes et tous nous concerner.

Non seulement car cela met en jeu notre vie en tant que citoyennes et citoyens d’une République. Mais aussi parce que cela bénéficie à toutes et à tous.

Et c’est là un point sur lequel nous devons insister. Car le bénéfice est aussi économique.

Nous savons bien que nous ne pouvons pas toujours compter sur l’altruisme, sur l’éthique et sur les valeurs. Mais il y a aujourd’hui un argument imparable, dans tous les domaines.

C’est l’argument économique. C’est, naturellement, quelque chose que je déplore, sur le plan de la vie intellectuelle, et du débat. Mais nous pouvons aussi nous en emparer pour faire avancer l’égalité, concrètement, et dans les faits.

Ces dernières années, alors même que les Etats Unis ne sont pas épargnés par les discours populistes, il y a un domaine dans lequel un certain nombre de progrès ont été accomplis. Les Etats, sans forcément l’abolir, se montrent de moins en moins enclins à condamner à mort. Savez-vous pourquoi ?

Parce que les associations contre la peine de mort ont dégainé l’argument massue : plusieurs études (dont celle de Paula Mitchell et Arthur L. Alarcon) montrent qu’un condamné à mort revient plus cher à un état qu’un condamné à perpétuité.

A ceux pour qui la souffrance et le désespoir qu’alimentent les inégalités n’est pas un argument suffisant pour agir, nous pouvons donc aussi leur dire que cela coûte cher. De nombreuses études le prouvent. Et là, nous risquons d’avoir leur attention.

Oui, l’égalité exige aussi que nous soyons capable de la défendre même contre celles et ceux qui n’ont pas nos convictions. Sinon, le risque est grand de ne convaincre que les convaincus.

Car l’égalité, c’est beaucoup d’effort pour la conquérir, mais il suffit de peu de temps pour la perdre. Loin d’être un état naturel, elle est le résultat d’une ambition politique, une ambition qui vibre et qui résonne avec une force particulière, ici, avec les jeunes socialistes

En choisissant l’égalité, on ne choisit jamais la voie de la facilité. Mais vous n’êtes pas de celles et de ceux que la difficulté rebute !

Voilà pourquoi, en choisissant l’égalité, vous avez choisi la voie la plus juste ! La voie de l’avenir !

Une voie dans laquelle je suis heureuse de vous voir si fermement engagés, avec tant de volonté et de détermination !

Et dans cette voie, vous pouvez être assurés d’une chose : je serai toujours à vos côtés, avec vous, comme je le suis aujourd’hui !

Je vous remercie.

Najat Vallaud-Belkacem,
ministre de l’Éducation nationale,
de l’Enseignement supérieur et de la Recherche

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2 commentaires sur Discours à la journée “Ma République, c’est l’Égalité” des Jeunes Socialistes

  1. Mez

    Vous montrer du doigt et vous menacer les binationaux p0urquoi? Un parti de gauche raciste avec des faux beurres annoblie avec des noms à particules pour essayer de r2coller la classe moyenne….personne ne vous aime vous êtes le plus grand échec politicien de l histoire vous avez écoeurer tous les français…allez vendre vos s’arracher le marché et prenez un arabe pour écouler vos salades le pire de tout y a que vous qui croit vos salades

  2. LANCIEN Dominique

    Bravo Najat ! Excellent Discours,mais surtout Excellentes Actions ! Et oui effectivement,ce sont les Adversaires des égalités que Nous devons convaincre ! Rien d mieux dans ce cas,que de prouver à tous ces Ultra-Libéraux Conservateurs que OUI ! Les investissements aux égalités sont en PLUS ! Bien moins coûteux que le maintien voir l’augmentation des inégalités !!! Car Nous devons titiller leur corde sensible,qui n’est rien d’autre que leur Satané FRIC !!!

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