Nous voyons les effets des créations de postes – Entretien à La Voix du Nord

Éducation nationale Publié le 30 août 2016

A l’occasion de la pre-rentrée, la ministre de l’Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem a accordé plusieurs entretiens dans la presse régionale.
Retrouvez ici l’entretien publié par La Voix du Nord.

Comment abordez-vous votre deuxième et peut-être dernière rentrée scolaire ?

« Avec beaucoup d’enthousiasme. Ce sera la première rentrée où l’ensemble de la refondation de l’école engagée depuis le début du quinquennat va se mettre en œuvre : la priorité au premier degré, le changement des programmes, le nouveau collège. Je pense aussi que ce sera une rentrée apaisée. Les tensions qu’on a connues dans le passé étaient liées aux suppressions de postes ou de classes avant 2012. Depuis la rentrée 2015, on voit les effets des créations de postes. On le constatera encore plus cette année puisque par exemple pour le premier degré, 3900 nouveaux postes sont déployés avec une démographie stable. »

La promesse de 60 000 postes créés pendant le quinquennat sera-t-elle tenue ?

« Les engagements du président Hollande en matière éducative auront été tenus, incontestablement. Pour les créations de postes, on s’était engagé à créer 60 000 postes dans l’éducation au sens large, c’est-à-dire 54 000 dans l’Éducation nationale, 5 000 dans l’enseignement supérieur et 1 000 dans l’enseignement agricole. Pour l’Éducation nationale, on atteint à cette rentrée 42 338 postes créés depuis le début du quinquennat. À la rentrée 2017, nous serons bien à 54 000 postes. »

On a souligné au départ les difficultés de recrutement. Le métier est-il redevenu attractif ?

« Les difficultés qu’on a connues sont la conséquence d’années de suppressions de postes qui ont amené des jeunes à se détourner du métier. Aujourd’hui, 93 % des postes ouverts au concours en juillet ont été pourvus, quasiment 100 % pour le premier degré. Dans le second degré, même dans les disciplines qui étaient en tension – maths, lettres ou langues – ça va de mieux en mieux. Les taux permettent de remplacer les départs en retraite et pourvoir de nouveaux postes. Les quelques tensions restantes seront pourvues par des contractuels mieux accompagnés et formés. Le problème de Créteil où il manquait 400 postes a été résolu par le concours exceptionnel que nous avons ouvert depuis l’année dernière à tous les candidats des autres académies. Cette année, cela fait 500 enseignants de plus à la rentrée en Seine-Saint-Denis. »

Avec de meilleures perspectives côté rémunération ?

« L’attractivité cela passe aussi par les mesures de revalorisation salariale, avec pour les professeurs d’école l’indemnité de suivi et d’accompagnement des élèves (ISAE) passée de 400 euros par an à sa création en 2013 à 1 200 euros dès cette rentrée, soit concrètement 100 euros par mois de plus. Au-delà du premier degré, la mise en œuvre du PPCR (parcours professionnel, carrière et revalorisation) permet une revalorisation indiciaire pour tous les enseignants, à tous les niveaux et surtout une meilleure reconnaissance de l’engagement des enseignants. Désormais les enseignants envoyés dans les établissements les plus difficiles auront un parcours de carrière nettement revalorisé notamment en fin de carrière. Ainsi, un enseignant qui aura passé huit ans en éducation prioritaire, ou qui aura exercé des responsabilités de directeur d’école, touchera 1 000 euros de plus par mois en fin de carrière que ce qu’il touche aujourd’hui. Ce ne sont pas des petites sommes ! »

Est-ce que les ESPE qui ont remplacé les IUFM fonctionnent bien ?

« Le fait d’avoir remis en place une formation initiale est beaucoup plus rassurant pour les jeunes qui décident de s’engager dans l’enseignement et pour les personnes qui veulent se reconvertir après une autre vie professionnelle. Les nouveaux enseignants ne sont plus livrés à eux-mêmes. Les ESPE n’ont pas grand-chose à voir avec les IUFM. C’est un changement qui se construit progressivement avec des améliorations chaque année. Ainsi l’expérience menée à Créteil et en Guyane d’une alternance entre ESPE et établissement scolaire dès la première année de master, alors qu’elle se fait aujourd’hui en deuxième année, a donné de très bons résultats. Nous allons l’étendre cette année aux académies d’Amiens et de Versailles. Les ESPE vont aussi contribuer de plus en plus à la formation continue des enseignants, avec des processus de certification leur permettant de progresser dans leur carrière. 99 millions d’euros sont affectés dans le budget à cette formation continue cette année, soit près de 30 % d’augmentation depuis 2014. »

Une rentrée « apaisée ». Cela veut dire que pour vous la réforme contestée des enseignements au collège est aujourd’hui acceptée ?

« Il ne faut pas sous-estimer le travail considérable effectué pendant l’année scolaire 2015/2016. C’est la première fois qu’avant de mettre en œuvre une réforme dans l’Éducation nationale, nous prenons soin de former l’ensemble de ceux qui vont avoir à l’appliquer. Concrètement, ce sont 700 000 jours de formation qui ont été consacrés à cette réforme. Enseignants et chefs d’établissement ont été initiés à la façon de construire un EPI (enseignement pratique interdisciplinaire), à l’accompagnement personnalisé, à ce que signifie avoir 20 % d’autonomie pour une équipe pédagogique comme le prévoit la réforme. Bien sûr vous trouverez toujours des résistances. On estime qu’entre 5 et 10 % des établissements ont été réticents dans ce travail jusqu’alors… »

Dans les petits collèges, avec des professeurs sur plusieurs établissements, la réforme est plus difficile à mettre en œuvre…

« Justement, l’accompagnement se poursuivra cette année en se concentrant sur les établissements qui rencontrent des difficultés. Cette réforme du collège fait partie d’un ensemble très cohérent qui garantit, qu’on le veuille ou non, elle sera réalité. Nous avons actionné l’ensemble des leviers pour permettre à tous les élèves du collège d’acquérir les compétences fondamentales et d’acquérir de nouvelles compétences.Tous les programmes ont été changés pour intégrer la réforme, avec des modules pour les EPI. L’évaluation prend en compte ce qui est demandé dans la réforme. Dans la nouvelle épreuve orale du brevet, il sera demandé aux élèves d’exposer le résultat de leur EPI ! Les programmes intègrent l’apprentissage plus précoce des langues vivantes ou encore du numérique. »

En quoi la réforme réduira-t-elle les inégalités sociales à l’école ?

« Jusqu’à présent quand on s’intéressait à ce problème, et tout le monde ne s’y intéresse pas, on se cantonnait à l’éducation prioritaire. Avec la réforme de l’allocation des moyens que j’ai menée à mon arrivée en 2014, on ne donne plus aveuglément aux établissements en fonction des seuls effectifs démographiques. Pour tous les établissements y compris hors éducation prioritaire, on tient compte de la situation sociale des familles des élèves.

La deuxième réponse apportée a été de revoir les pédagogies pour traiter à la racine la question des inégalités scolaires et s’assurer que tous les élèves ont vraiment appris et consolidé leurs apprentissages. D’où la réforme des programmes qui repense la scolarité en cycle de trois ans : maternelle, CP-CE1-CE2, CM1-CM2-6ème pour bien assurer la liaison école-collège, ce qui n’était pas fait jusqu’à présent et était problématique pour les élèves vulnérables, et enfin 5ème, 4ème, 3ème. Cette conception donne du temps aux élèves qui ont des rythmes d’apprentissage différenciés pour acquérir leurs apprentissages. Elle s’assure qu’on ne laissera pas passer au collège comme aujourd’hui quasiment 25 % des élèves sans maîtrise des fondamentaux que sont le français ou les mathématiques. »

Qu’est ce qui garantit qu’un élève qui n’a pas appris à lire en CP le fera en CE1 ?

« Les nouveaux programmes des premiers cycles insistent comme jamais sur les fondamentaux. En plus des dix heures hebdomadaires de français déjà prévus dans les anciens programmes, dix heures de plus sont consacrées à faire faire aux élèves, même si on est en histoire ou en maths, des travaux de lecture ou d’écriture. Ils prévoient des exercices quotidiens de dictée et de calcul mental qui n’existaient pas avant. »

N’avez-vous pas dû céder à la pression pour le maintien des classes bilangues ? Et pourquoi en maintenir 90 % à Paris et seulement 40 % dans l’académie de Lille ?

« Il n’y avait pas de raisons de maintenir les bilangues destinées à quelques élèves, alors que tous vont bénéficier de l’enseignement d’une seconde langue vivante dès la cinquième grâce à la réforme. En revanche, dans le cadre de notre volonté de diversifier le choix des langues dès le primaire, nous avons maintenu la possibilité pour les élèves de commencer l’anglais dès la sixième dès lors qu’ils ont choisi une autre langue au primaire. C’est ce que nous appelons les bilangues de continuité. Ce sont celles-là qui ont été maintenues comme je m’y étais engagée dès le printemps 2015. De fait il y avait plus de classes bilangues de continuité à Paris que dans d’autres académies mais c’est absurde de dire c’est Paris contre la province. On a eu la volonté de développer ces classes partout en France particulièrement dans les endroits les plus en difficulté sociales. Ça a été fait deux fois plus dans l’académie d’Amiens que dans celle de Paris ! »

En cette rentrée, vous ne voyez pas de divorce entre la gauche et les enseignants ?

« Il ne faut pas s’étonner qu’il y ait de l’agacement ici où là chez les enseignants, y compris quand ils adhèrent à notre projet, à se voir bousculer par des réformes, et elles ont été nombreuses dans le cadre de refondation. Mais sur le moyen- long terme je ne doute pas que les enseignants font la différence entre la gauche et la droite ! »

Propos recueillis par Hervé Favre pour La Voix du Nord.

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Un commentaire sur Nous voyons les effets des créations de postes – Entretien à La Voix du Nord

  1. Rossi

    Cette gente dame a certainement eu plus de chance que quelques millions de pieds noirs en 1962..mis au pilori de la République socialo gaulliste de l’époque…nous étions les juifs ou les chrétiens ou les musulmans de 1920/1962….Nous avons souffert pour que vous soyez enfin assimilés vous et vos amis ..et aussi nos ennemis .Nous avons payé un lourd tribu pour que vous deveniez une ministre incompétente…car en manque d’expérience …pas en manque de fierté et d’arrogance!

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