Une révolution silencieuse à l’Université: l’égalité en marche entre les femmes et les hommes

Droits des femmes Publié le 28 mars 2013

Najat Vallaud-Belkacem, signature de la charte Egalité femmes-hommes à l'Université, le 28 janvier 2013, à l'Observatoire de Paris

A l’Observatoire de Paris, Najat Vallaud-Belkacem, lors de la signature de la charte Egalité femmes-hommes à l’Université et la recherche, le 28 janvier 2013.


Une fois le ministère des droits des femmes réinstallé par la gauche, il n’y avait pas de temps à perdre. Car l’illusion – parfois de bonne foi – que l’essentiel des droits sont acquis pour les femmes ne doit pas masquer une réalité qui a la peau dure et qui est quotidiennement vécue par une grande majorité des femmes dans notre pays : l’égalité de droits est encore loin d’être synonyme aujourd’hui d’une égalité réelle.

Dans beaucoup de domaines, les outils sont là, des lois ont permis des avancées : reste à les faire appliquer.

Mais le monde de l’université, lui, est resté trop longtemps à l’écart de ces avancées : aucune mesure n’avait jamais été prise pour faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes. Un îlot au sein de la société en quelque sorte, où les femmes ne sont que 24% des professeurs et 8% des membres de direction, alors qu’elles sont largement majoritaires parmi les étudiantes.

Depuis le 11ème siècle et la naissance de l’université, le monde de la recherche et de la connaissance a ouvert la voie à des progrès de l’égalité femme-homme : on pense bien sûr aux figures de Marie Curie, mais surtout à celle d’Irène Joliot-Curie, première femme ministre de la recherche du Front populaire en 1936. Pourtant, malgré de nombreux parcours individuels réussis, la démocratisation de l’enseignement supérieur a reproduit des inégalités: la première femme major de polytechnique en 1972 n’a pas empêché la persistance d’une orientation sexuée, notamment en sciences ou dans les filières d’ingénieurs; les travaux visionnaires de Simone de Beauvoir sur le deuxième sexe n’ont pas empêché un retard important des études de genres en France par rapport aux pays anglo-saxons ; les efforts pour imposer la parité en politique n’ont pas permis d’atteindre cet objectif dans l’université. Au rythme auquel on va aujourd’hui, si on laisse faire, il faudrait attendre 2068 pour avoir la parité chez les professeurs d’université et 2075 avant que les écoles d’ingénieurs aient autant d’étudiantes que d’étudiants !
Et encore, rien n’est sûr : la position des femmes à des postes de directions dans les universités et les laboratoires a même régressé : le nombre de femmes présidentes d’universités est passé de 16% à 8% entre 2008 et 2012!

Ce paradoxe entre un monde aux avant-postes du progrès social et de la connaissance et les retards accumulés ont conduit le gouvernement à remettre l’université en mouvement vers l’égalité entre femmes et les hommes.

C’est pourquoi dès le Comité interministériel du 30 novembre dernier, nous avons pris des engagements très forts avec la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Geneviève Fioraso, pour notamment assurer la parité au sein des instances universitaires.

Après la Charte pour l’égalité femmes-hommes d’accompagnement des universités, signée le 28 janvier dernier par 300 établissements d’enseignement supérieur, le projet de loi d’orientation sur l’enseignement supérieur et la recherche, qui sera déposé mercredi en Conseil des ministres, constitue une étape historique.

Il fait de la parité une priorité a tous les niveaux de représentation, locaux et nationaux, et il impose la présentation de listes paritaires aux élections des différents conseils des universités, ainsi que dans les instances nationales (CNESER, nouveau Haut Conseil de l’évaluation qui replacera l’AERES, et futur Conseil stratégique de la recherche). C’est là un véritable tournant. Car c’est ainsi que nous pourrons agir sur les représentations et dépasser le plafond de verre en incitant les jeunes filles à poursuivre les carrières scientifiques auxquelles leur niveau académique les destine naturellement.

C’est bien l’université et la recherche qui doivent montrer, de nouveau, le chemin du progrès pour notre société.

Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, porte-parole du gouvernement.

Tribune initialement publiée sur le HuffingtonPost, mardi  26 mars 2013.

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