Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, lance l’année de la mixité professionnelle 2014 – Discours

Droits des femmes Publié le 8 janvier 2014

Ce lundi 6 janvier 2014, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, s'est rendu sur le chantier du Château de Versailles avec accompagné de Michel Sapin, ministre du Travail, de l'Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, de Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, porte-parole du Gouvernement, et de Marylise Lebranchu, ministre de la Réforme de l'Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique.

Lors de ce déplacement, le Premier ministre a lancé l’année de la mixité professionnelle et présenté les feuilles de route adoptées à la suite du second Comité interministériel aux Droits des femmes.
Retrouvez ici le discours prononcé par le Premier ministre à cette occasion.  Seul le prononcé fait foi.

Mesdames et messieurs les ministres,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Mesdames et messieurs les élus,
Madame la présidente de l’établissement public du Château de Versailles,
Mesdames et messieurs,

 

J’ai souhaité consacrer ce premier déplacement officiel de l’année aux droits des femmes pour témoigner de la priorité que le Gouvernement accorde à ce combat.

Et j’ai souhaité m’exprimer devant vous pour vous dire notre reconnaissance vis-à-vis de tous ceux qui, comme vous, ont contribué à faire de 2013 une année de progrès pour l’égalité dans notre pays.

Plus d’un an a passé depuis le conseil interministériel des droits des femmes en novembre 2012. Un an de travail, de projets, d’expérimentations et d’actions concrètes qui ont permis d’avancer dans tous les domaines.

2013 a été l’année de la parité politique, et c’est pour les droits des femmes que nous en avons fait une pierre angulaire de nos réformes institutionnelles. Cette obligation a été étendue pour les élections municipales et sénatoriales. Elle a été généralisée pour les élections départementales, avec l’instauration d’un mode de scrutin qui permettra l’élection de 50% de femmes dans tous les conseils généraux à compter de 2015.

C’est pour les droits des femmes que nous avons mobilisé les partenaires sociaux autour de l’égalité professionnelle. Deux accords syndicaux ont été signés à cette occasion. Le premier l’a été dans la fonction publique le 8 mars dernier, et nous étions là, à Matignon, avec Marylise Lebranchu pour le signer aux côtés de l’ensemble des organisations syndicales représentatives. Et le deuxième au niveau national interprofessionnel le 19 juin, sous la conduite de Michel Sapin.

C’est pour les droits des femmes que nous nous sommes efforcés de faire appliquer – enfin !- les obligations légales des entreprises. Et de ce point de vue, il y aura un avant et un après 2013. Grâce à la mobilisation du ministère du Travail, nous sommes ainsi passés de 2 mises en demeure adressées en juin 2012 à plus de 550 aujourd’hui ; 5 entreprises ont finalement été sanctionnées.

Au-delà des contrôles, ce sont aussi les possibilités de négociation d’entreprise offertes par la loi qui ont été plus largement utilisées. Près de 4000 accords ou plans d’actions ont ainsi été transmis aux services de l’inspection du travail depuis un an.

C’est pour les droits des femmes que nous avons engagé cette année la réforme du congé parental. Elle se concrétisera dans le projet de loi porté par Najat Vallaud-Belkacem et permettra d’impliquer davantage les pères dans des obligations familiales dont trop d’entre eux s’exemptent encore aux dépens des femmes. Cette première réforme sera évaluée en 2016 et, s’il s’avère qu’elle fonctionne, nous l’amplifierons.

Trop d’inégalités résultent encore du déséquilibre au sein des couples dans la gestion des tâches domestiques, et c’est pour permettre aux femmes de ne pas avoir à sacrifier leur travail que j’ai lancé, en juin dernier, un plan qui permettra de créer d’ici 2017 275 000 solutions d’accueil supplémentaires.

La loi doit protéger, notamment les plus faibles, et c’est d’ailleurs dans cet esprit que nous avons adopté le 25 novembre le plan interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes. Aucune violence déclarée ne doit rester sans réponse. Tout en découle, depuis la prise en charge sanitaire renouvelée des victimes en passant par leur mise à l’abri, via des réponses nouvelles pour lutter contre la récidive des auteurs, via le téléphone d’alerte, via l’ordonnance de protection renforcée ou des places d’hébergement dédiées et adaptées en nombre suffisant : 1650 solutions dédiées et adaptées supplémentaires d’ici 2017. Sur 3 ans, l’engagement de l’Etat s’élèvera à 66 M€, ce qui constitue un effort inédit.

Mesdames et messieurs, l’égalité est dans tous nos projets. Nous avons donc agi partout, sans exclusive et sans tabou, parce que les inégalités elles-mêmes sont partout. Voilà pourquoi l’égalité femmes-hommes ne peut être une simple option mais une politique intégrée portée par tous les ministres et présente dans toutes les politiques publiques. C’est la méthode que nous avons appliquée, et avec le recul de cette première année, l’expérience montre que cela peut faire la différence dans un projet de loi. Je pense en particulier à la réforme des retraites où la question de l’amélioration des pensions des femmes a été mise au cœur de notre projet, là où, en 2010, elle n’était vraiment apparue dans le débat que sous la pression des mouvements féministes.

C’est sur cette impulsion qu’il nous faut désormais construire, et si j’ai souhaité vous réunir en ce début d’année 2014, c’est pour vous présenter aussi notre feuille de route pour l’égalité : un programme enrichi pour faire de 2014 une nouvelle année décisive pour les droits des femmes.

Cela passera d’abord par une nouvelle logique de résultat et par la définition d’un certain nombre d’objectifs chiffrés dont chaque ministre assurera le suivi et sera le garant. Je pense à l’emploi des femmes, à l’égalité professionnelle, à la lutte contre la précarité et contre les violences faites aux femmes ou encore à la parité dans la sphère politique économique et sociale.

Chaque ministre a reçu ce matin sa nouvelle feuille de route pour l’égalité. Chacun d’elles décline un ensemble de mesures qui portent sur les politiques dont il a la responsabilité.

Deux priorités transversales domineront par ailleurs notre action :

1ère priorité, nous devons mobiliser nos énergies pour accroître le taux d’activité et d’emploi des femmes. Il y a aujourd’hui encore 9 points d’écarts entre le taux d’emploi des femmes et celui des hommes. Cet écart est une perte de valeur inacceptable pour notre pays. Dans les quartiers de la politique de la ville, en 2012, plus de 40% des femmes sont inactives.

C’est pourquoi l’objectif, d’ici 2025, doit être d’annuler complètement l’écart de taux d’emploi entre femmes et hommes.

L’OCDE estime qu’atteindre cet objectif permettrait d’accroître notre croissance potentielle de 0,5 point de croissance en plus par an. 0,5 points de croissance, cela paraît faible pris isolément, mais c’est considérable et c’est un levier important pour enrichir le contenu de la croissance en emplois.

Pour y parvenir, il faut évidemment lever tous les obstacles au développement de l’activité des femmes. L’emploi des femmes doit devenir un pilier de notre nouveau modèle social. Nous en avons fait une des dimensions de la réforme de la politique familiale que j’ai annoncée en juin dernier. Ce fut aussi une des dimensions de la réforme des retraites. C’est aujourd’hui l’un des objectifs du compte personnel de formation. Et ce sera l’un des enjeux de la réforme des dispositifs de soutien aux travailleurs pauvres.

Mais chacun doit aussi être conscient qu’il n’y aura pas de progression de l’emploi des femmes sans une amélioration de la qualité des emplois qu’elle occupe. Et cela implique une véritable mixité des métiers.

Ce sera notre deuxième priorité pour 2014 la mixité des métiers.

Nous nous attaquons ici à un défi central. Songez que, dans notre pays, moins d’un métier sur 8 peut être considéré comme réellement mixte. Cette situation pénalise non seulement les femmes mais notre économie tout entière en abaissant la réserve de talents disponibles et en renforçant les difficultés de recrutement pour les employeurs, notamment dans des secteurs où les emplois ne sont pas délocalisables.

L’évolution spontanée de la société ne suffit pas sur ces questions. Les progrès enregistrés depuis 30 ans sont très modestes. C’est le rôle de l’Etat que d’intervenir. Certes des initiatives sont déjà prises, et nombreux sont les acteurs qui sont représentés ici ce matin qui y contribuent souvent de façon remarquable mais aucune politique n’a jamais été organisée en la matière, en travaillant avec les branches professionnelles, avec l’éducation nationale et avec les régions.

C’est pourquoi nous mettrons en place, dès cette année, les réformes et les outils que nous permettrons d’ici 2025 qu’un tiers des métiers deviennent mixtes.

Pour y parvenir, nous établirons tout au long de l’année 2014 dans 10 secteurs clés des plans d’actions mixité. Dans les métiers de la petite enfance, du grand âge, des services à la personne, de la sécurité civile, de l’énergie et du développement durable, ces actions seront construites avec les acteurs professionnels. Ils associeront des mesures de sensibilisation publique, de mobilisation de l’offre de formation et des filières d’apprentissage et un travail sur les processus de recrutement.

Avec les partenaires sociaux, nous devrons travailler sur la lutte contre les discriminations au travail pour laquelle une concertation a été engagée à la suite du rapport de Mme Pecaut-Rivolier. Des concertations sont en cours qui permettront rapidement de définir les instruments de lutte contre les discriminations au travail et leurs modalités de mise en œuvre.

Cela concernera la sphère professionnelle, mais aussi la sphère éducative qui conditionne l’accès aux métiers. Nous engagerons des programmes pour favoriser la mixité, dans les candidatures aux concours de l’enseignement ou dans les filières les plus concernées, en particulier de l’innovation scientifique et des technologies.

Enfin, il n’y aura pas de progrès si nous ne savons pas intéresser le grand public à cette question. Nous lancerons donc une grande campagne de communication sur ce sujet en 2014.

C’est une démarche d’ensemble que nous proposons dans laquelle toutes les politiques publiques servent l’égalité mais dans laquelle l’égalité sert aussi de moteur pour l’emploi, la croissance et le redressement de notre pays.

Là est notre conviction profonde : il ne peut y avoir de redressement sans égalité. Il ne peut y avoir de reprise économique durable si trop de nos concitoyennes sont maintenues à l’écart de l’emploi, sans perspective d’évolution personnelle.

L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est à nos yeux un levier puissant de modernisation de notre société. Voilà pourquoi vous nous trouverez toujours déterminés à faire avancer les droits des femmes. Non seulement parce que c’est la situation de millions de nos concitoyennes qui s’y joue, mais plus largement parce que c’est aussi l’avenir du pays tout entier qui en dépend.

Je vous remercie.

Jean-Marc Ayrault, Premier ministre.

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Crédit Photo © Yves MALENFER / MATIGNON

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