Portrait de Jean Zay

Éducation nationale Publié le 26 mai 2015

A la veille de son entrée au Panthéon, retrouvez ici le portrait de Jean Zay, ministre de l'Éducation nationale et des Beaux-Arts. Ce portrait signé Najat Vallaud-Belkacem a été dans l'Obs à la fin de l'année 2014.

Dans ses discours, Jean Zay aimait s’approprier la formule d’Alfred de Vigny selon laquelle « une vie réussie est un rêve de jeunesse réalisé dans l’âge mûr ». Avec son entrée au Panthéon, ce sont la jeunesse assassinée de Jean Zay, son action et sa pensée exemplaires liant indissociablement l’école publique à l’esprit de la Résistance qui trouvent un accomplissement d’une frappante actualité.
Songeant au destin du jeune (31 ans!) ministre de l’Éducation nationale du Front populaire, exécuté par la milice le 20 juin 1944 à Cusset (Allier), la référence aux heures sombres des années 1930 vient naturellement à l’esprit. Le poison de la défiance s’est de nouveau instillé dans les cœurs. Les passions identitaires nourrissent le séparatisme social, parfois la haine et la violence. Alors, oui, la « panthéonisation » de Jean Zay aux côtés de Germaine Tillion, de Geneviève de Gaulle-Anthonioz et de Pierre Brossolette est l’occasion de réaffirmer combien les valeurs de la Résistance sont celles qui nous permettent de faire société.

Mais l’exemple de Jean Zay est aussi porteur d’un espoir et d’une exigence actuelle pour l’école publique, indissociable de son combat républicain. Il n’aura pas seulement résisté contre l’occupant nazi et l’État collaborationniste.

De ses débuts politiques jusqu’ à sa captivité à Riom, après l’infamante condamnation qui le frappa injustement aux côtés de Pierre Mendès-France, il aura œuvré toute sa vie pour la démocratisation scolaire, pour l’émancipation par l’éducation, pour une école publique laïque capable non seulement de transmettre des savoirs, mais aussi de former des citoyens.

C’est ainsi que l’Éducation nationale d’aujourd’hui porte encore la marque de ses réformes, sur l’obligation scolaire, l’organisation distinguant premier et second degrés, la logique de tronc commun des enseignements portant en germe le collège unique et le socle commun, les débuts de la médecine préventive ou le premier réseau de centres d’orientation. Avec Léo Lagrange, il initia une conception large de l’éducation, incluant l’accès au sport et à la culture. Enfin, il réalisa avec Jean Perrin (qu’il rejoint au Panthéon) le lien avec la recherche scientifique en étant un des artisans du futur CNRS.

Jean Zay fut ainsi « le Jules Ferry du Front populaire », qui, par-delà son action, laissa aux générations suivantes une vision globale et des plans qui sont aux fondements de l’école moderne, ainsi qu’une méthode nouvelle : acquis aux vertus de l’expérimentation, il faisait d’abord confiance aux pédagogues que sont les enseignants, soutenant par exemple Célestin Freinet. Il avait compris, peut-être le premier, que les réformes de l’éducation ne peuvent se faire qu’avec les enseignants, que le rôle du ministère est d’abord de fixer des orientations et de soutenir les praticiens. C’est cet état d’esprit qui doit nous inspirer pour la refondation de l’école.

Pour avoir aujourd’hui l’immense chance de lui succéder, je mesure chaque jour, dans le bureau qui fut le sien, combien son exemple éclaire encore notre présent. Les combats actuels contre le déterminisme social et les inégalités scolaires, pour refaire de l’école un creuset laïque de citoyenneté, améliorer l’orientation, s’adapter aux besoins divers des territoires, ouvrir les communautés pédagogiques aux acteurs sociaux, sportifs, culturels et scientifiques ou porter un plan numérique de modernisation pédagogique… ne font que prolonger les siens.

On dit souvent que l’histoire est un éternel recommencement, comme une invitation à l’humilité et à l’action. L’histoire de l’école se confond avec celle de la République, et le destin plaça Jean Zay au cœur du progrès de l’une et de l’autre. Jean Zay incarne la République non seulement par ce qu’ il a fait pour elle, mais aussi par ce que ses ennemis lui firent. Alors, je conserve précieusement les mots de son ancien collaborateur, Jean Cassou, qui écrivait en 1945, songeant aux traîtres et aux bourreaux, qu’ ils « ne peuvent imaginer la lumière et la volonté que nous communiquent nos morts » . Avec l’entrée de Jean Zay au Panthéon, rejoignant Jaurès et Gambetta, ce sont cette lumière d’émancipation par l’école et cette volonté farouche de défendre la République qui participent de notre édification collective.

Najat Vallaud-Belkacem

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11 commentaires sur Portrait de Jean Zay

  1. Stop Chauvinisme

    Merci Fréderic! Peut-être il faut plutôt abolir ces parcours élitistes de l’ENA et ne pas les parcours en allemands pour les sixièmes de 11 ans qui veulent parler avec leurs correspondants allemands!!!! Ce n’est pas l’élitisme, c’est leurope! Acceptez les droit d’être européen et parler des langues!!!. Contre ce chauvinisme de ce clan de lENA qui se prend le droit mettre en question la traité de lElysee! Stop! Cela suffit!

  2. Heros - Helden

    Depuis quatre jours fêter les heros et la gloire de la France avec les drapeaux uniquement NATIONAUX? Rien contre les resistants et mon grand respect. Pourtant c’est 2015 et c’est le temps que la France se réveille et travaille son histoire. Tortures, violence en Algerie; politique d’une francophonisation violente, non respect des langues minoritaires dans le propre pays et non respect de ces minorités aussi vivant en France. Signez avec François Hollande la charte de langue minoritaires en France pour les proteger et créer la plurlingualité. Alors Mme Najat, j’attends vraiment de plus! Que la France est un pays des resistants, on le sait maintenant! Developpez la France plurilingue. Les droits de vote pour tous! C’est l’heure de leurope!

  3. Karine Fages

    Pour que les faits de résistance soient honorés, et non aveuglément sanctionnés, merci de prendre connaissance de cette incompréhensible décision en Haute-Garonne, afin que ces enseignants soient ré-intégrés dans leur collège :
    https://www.change.org/p/m-le-pr%C3%A9sident-de-la-r%C3%A9publique-fran%C3%A7ois-hollande-mme-la-ministre-de-l-%C3%A9ducation-nationale-najat-vallaud-belkacem-mme-la-rectrice-de-l-acad%C3%A9mie-de-toulouse-h%C3%A9l%C3%A8ne-bernard-r%C3%A9int%C3%A9grez-imm%C3%A9diatement-les-6-enseignants-sur-leur-lieu-de-travail-et-levez

  4. Hundertwasser

    Vous ne manquez pas de culot pour vous proclamer dans la continuité de Jean Zay, vous c’est tout l’inverse ! Vous c’est l’inculture élevée au rang de discipline, le bagage culturel indigent, le nivellement par le bas, l’uniformisation stérile, la fin de la pluralité linguistique, l’école du vide.

  5. OXYGENE

    Rien contre Jean Zay, mais c’est maintenant le temps d’abolir son école ENA (ou ouvrir ses écoles, pour ne pas ignorer le peuple) et abolir élistisme de lENA avec ses privileges . Supprimer les sixièmes en Allemand en raison d’élistisme en protegant les vraies élites en face d’une concurrence de cadres plus qualifiée et sûrement souvent plus intellectuelle est une effronterie. Est-ce qu’un pays veut vraiment devenir médiocre? OPEN THE DOOR, FRANCE. OXYGENE! WE NEED IT! Contre le chauvinisme linguistique de ces cadres, pour la plurlingualité, pour la valorisation de la diversité dans la société, pour déhierarchisation et pour une vraie acceptance des citoyens européens en Europe.

  6. appel intersyndical à la grève le 11 juin

    Les organisations syndicales SNES-FSU, SNEP-FSU, SNFOLC, SNETAA-FO, CGT Educ’action, SUD Éducation, SNCL-FAEN et SIES-FAEN constatent l’enferment du ministère dans son maintien de la réforme du collège et son refus d’entendre les demandes des personnels d’enseignement, d’éducation et d’orientation du second degré.
    Confirmant leur analyse commune de la réforme et des conditions de la publication des textes le 20 mai, elles appellent les personnels à amplifier l’action, en particulier le 4 juin, contre les textes publiés au lendemain d’une grève majoritaire dans les collèges, pour leur abrogation et la reprise immédiate des discussions sur l’avenir du collège.
    Elles appellent à signer et faire signer massivement la pétition intersyndicale « Un autre collège 2016 ». Elles appellent à une nouvelle journée nationale de grève et d’actions le jeudi 11 juin.

    La publication du décret et de l’arrêté définissant l’organisation du collège à partir de la rentrée 2016 met en place une réforme du collège plus bureaucratique que pédagogique qui ne répondra pas aux besoins de formation de la jeunesse de ce pays, ne réduira pas l’échec scolaire et mettra profondément en cause l’égalité d’accès aux savoirs et aux qualifications sur le territoire.
    Elle est de plus un affront à une profession qui se bat au quotidien pour la réussite des jeunes qui lui sont confiés.
    Les signataires demandent l’abrogation de ce décret et de cet arrêté et la reprise immédiate des discussions sur l’avenir du collège.
    Pétition à signer sur http://www.unautrecollege2016.net

  7. Citoyen exaspéré

    Sa conception de l’enseignement n’était pas un collège unique fourre-tout où on devrait tout faire pour lutter contre l’ennui supposé des élèves, suivant leur inclination au zapping et au moindre effort ! C’est un lieu où tous se retrouveraient avec de quoi élever chacun selon ses capacités qu’il nous faut. Bien loin de votre projet de réforme qui supprime ce qui marche et élève les élèves, en particulier les plus défavorisés pour des raisons familiales ou sociales. Ceux dont les parents paieront cours particuliers et séjours à l’étranger n’ont pas de souci à se faire, le collège public renonce à toute excellence qui aurait pu permettre aux plus méritants de les concurrencer… Elle est belle l’égalité !

  8. S. Zink

    Merci, M. Auria.
    Propagande, c’est le mot.
    Et hiatus, gouffre, années-lumière… entre M. Zay et l’inculture au pouvoir.

  9. Frédéric AURIA

    Surtout, ne vous comparez pas à lui, car une chose est sûre, il aurait fait un autre collège que celui que vous prétendez nous imposer ! Les LV2 seront enseignées seulement 2h par semaine si elles sont prises dans un EPI, nullité des élèves assurée. Petite démonstration en vidéo pour l’allemand https://www.youtube.com/watch?v=iyUMDDI_FFM&feature=youtu.be
    Pas vraiment en phase avec votre propagande… Il a créé l’ENA, école élitiste s’il en est, à l’entrée de laquelle vous avez échoué à deux reprises…

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