Égalité salariale : pour moi, c’est un droit fondamental et un enjeu de compétitivité

Droits des femmes Publié le 25 avril 2013

Retrouvez ici ma tribune publiée par Le Nouvel Obs pour le 25 avril, journée de l’égalité salariale femmes-hommes ( Equal Pay Day ).

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Savez-vous que seuls 46% des hommes ont envie de s’impliquer sur un sujet comme la réduction des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes ? Contre 64% des femmes, bien sûr. Cet écart des consciences est un gouffre. Un gouffre, dans lequel notre économie perd ses atouts les plus essentiels. Un gouffre qu’il est temps de combler. La prise de conscience est la première étape de l’action.

L’égalité des salaires est un droit fondamental. Les femmes sont pourtant payées un quart de moins que les hommes en moyenne. Une injustice en partie liée au retard pris dans les carrières au moment de la naissance des enfants. Liée aussi au fait que les femmes travaillent plus souvent à temps partiel, qu’elles ont moins accès aux rémunérations variables, moins accès aux responsabilités. Au-delà de ces explications, il reste encore 9% de discriminations pures entre les femmes et les hommes, à poste pourtant égal. Des chiffres que rien ne justifie.

En juillet dernier, nous avons mis ce sujet au cœur de la grande conférence sociale. Notre feuille de route, définie avec les partenaires sociaux, reposait sur deux axes : la sanction, dont il revenait à l’Etat de renforcer l’effectivité et l’incitation ; et la négociation, que les partenaires sociaux n’avaient pas menée à bien sur ce sujet depuis neuf ans.

L’Etat a respecté ses engagements. Depuis 2010, une loi prévoit des sanctions pour les entreprises de plus de cinquante salariés qui ne font rien en matière d’égalité. Elles encourent une pénalité pouvant aller jusqu’à 1% de leur masse salariale. A l’époque cependant, le gouvernement n’en a jamais assuré l’application.

Lorsque j’ai pris mes fonctions au printemps dernier, deux mises en demeure seulement avaient été prononcées et aucune sanction n’était tombée. En décembre 2012, nous avons donc adopté des dispositions nouvelles et pragmatiques, donné des instructions pour que les services de l’Etat procèdent à des contrôles systématiques. Depuis, plus d’une centaine d’entreprises ont été mises en demeure. Et les premières sanctions tombent. D’autres n’ont pas eu besoin de sanction pour comprendre que dégager chaque année une enveloppe, même modeste (0,5 à 1% de la masse salariale) dédiée à la résorption des écarts de rémunération, œuvre en quelques années au rétablissement de l’égalité.

Reste le chantier de la négociation. Notre arsenal juridique, tel qu’il s’est construit depuis 40 ans, donne un rôle essentiel à cette dernière dont hélas les partenaires sociaux ne se saisissent pas, ou trop peu. Je suis convaincue qu’ils doivent réapprendre à le faire, y compris en faisant évoluer la représentation des femmes en leur sein. Ils ont aujourd’hui la main. Qu’ils la prennent. Sortons des négociations balbutiantes et hésitantes. Car l’enjeu est tout aussi stratégique pour notre compétitivité que l’était l’accord sur la sécurisation de l’emploi.

Tout ce qui contribue à l’égalité participe de la cohésion et de la consolidation des communautés de travail, de la qualité de vie au travail. Et donc, de la performance économique. Rien n’est plus délétère pour la motivation au travail que le sentiment d’être traité injustement.

La question de l’égalité professionnelle est vitale pour une entreprise. Sa capacité à attirer des femmes autant que des hommes multiplie ses chances de trouver les bonnes compétences pour les bons postes. Cela suppose de regarder tous les profils à leur juste valeur en se délestant des schémas, des représentations et des mécanismes de cooptation inconsciente. S’ouvrir à un environnement nouveau, valoriser des métiers auprès des deux sexes est même déterminant pour l’avenir de certaines professions confrontées à une pénurie de candidats, comme c’est le cas dans les métiers de bouche, du bâtiment ou encore de l’ingénierie.

Quant à la société française, peut-elle vraiment se permettre de passer à côté de toutes ces femmes diplômées ? Nous avons tant investi dans leur formation. Leur avenir est-il d’être employées en dessous de leurs compétences, d’être toujours cantonnées aux marges des responsabilités ? J’affirme que non. Et je ne suis pas la seule.

Avons-nous les moyens de laisser en dehors du marché du travail ou à sa lisière dans des tâches trop précaires et trop partielles les femmes les moins qualifiées ? N’avons-nous pas au contraire tout à gagner à la sécurisation, à la protection de ces millions de salariées à temps partiel, en particulier dans les services à la personne, aux journées fractionnées, aux droits sociaux inexistants, aux fins de mois infernales ? Tout à gagner à les former, à leur permettre de progresser, à professionnaliser leurs interventions, à améliorer la qualité du service rendu aux ménages et aux entreprises, tout en améliorant la qualité de leurs emplois ? C’est de tout cela que nous avons décidé de nous saisir avec la réforme du marché du travail qui prévoit un salaire minimum horaire, des horaires en continu, l’accès aux droits sociaux. Le travail doit être poursuivi. Nous y serons vigilants.

En conclusion pourquoi, alors que les atouts concurrentiels se font si rares pour retrouver la croissance, et que les femmes sont plus nombreuses que jamais, ne pas les envisager comme autant d’atouts de compétitivité ? Selon la Commission européenne, le jour où nous aurons pleinement réussi à assurer l’égalité entre les femmes et les hommes en termes d’accès à l’emploi et de rémunération, nous aurons accru notre potentiel de richesses de 20 à 40%. L’égalité est la première ressource de compétitivité de notre pays. Nous allons l’exploiter, vraiment.

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2 commentaires sur Égalité salariale : pour moi, c’est un droit fondamental et un enjeu de compétitivité

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    Savez-vous qu’a compétences et responsabilités supérieures, je gagne moins que certains collegues, sous le seul pretexte qu’il y a 25 ans ils ont eu un diplome superieur au mien ?
    Ah, je suis un homme et mes collègues sont aussi bien des hommes que des femmes…
    L’égalité salariale devrait-elle s’appliquer ?
    Merci de votre réponse.

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