Najat Vallaud-Belkacem, la ministre des Droits des femmes a accordé une interview exclusive à Ouest-France. Elle évoque la nouvelle loi sur le harcèlement sexuel qui doit être adoptée mardi au Parlement. La jeune ministre se déclare satisfaite d’un texte qui punit plus lourdement.
Des modifications ont été apportées sur le projet de loi que vous avez présenté le 13 juin. Cette ultime version vous satisfait-elle ?
Oui. À travers ce texte, nous avons souhaité une protection renforcée des victimes, une définition beaucoup plus précise du délit, et une sécurité juridique, afin d’éviter que le texte soit à nouveau censuré. Depuis la situation de vide juridique laissé par le Conseil constitutionnel, le 4 mai, les tribunaux ont été appelés à requalifier les affaires en cours. Certaines ont toutefois dû être classées. Il était nécessaire de réagir très rapidement. Il y a deux dimensions du harcèlement sexuel : le harcèlement répétitif, d’une part, et les situations où l’acte ne se produit qu’une seule fois mais est tellement grave qu’il doit être incriminé. Par exemple, lors d’un entretien d’embauche où s’opère un véritable chantage sexuel. Les peines encourues sont plus lourdes que par le passé. Jusqu’à présent, la sanction était d’un an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende. Elle s’élèvera à deux ans et 30 000 €, dans les deux cas, portée à trois ans et 45 000 €, en cas de circonstances aggravantes.
En quoi ce texte est-il novateur ?
Au-delà de la définition du harcèlement et des circonstances aggravantes, les débats parlementaires ont permis d’ajouter la notion de vulnérabilité économique. Si l’auteur du harcèlement connaît la situation de précarité de sa victime et en joue, c’est une circonstance aggravante. Autre élément, le texte prévoit de lutter contre l’hostilité envers les personnes transsexuelles. Enfin, cette loi s’applique également à la fonction publique.
La droite et certaines associations féministes soulignent que le harcèlement sexuel (2 ans et 30 000 €) est moins pénalisé que le vol (3 ans et 45 000 €)…
Nous devons respecter la cohérence des peines applicables aux délits sexuels : cela va de l’exhibition, punie d’un an d’emprisonnement jusqu’au viol, puni de dix ans, en passant par l’agression sexuelle, cinq ans. Avec deux ans, le harcèlement vient logiquement s’intercaler. La sévérité de la peine importe, mais aussi la certitude qu’elle soit appliquée est essentielle. On peut considérer que 2 % des femmes sont victimes de harcèlement sur leur lieu de travail, cela fait 300 000 femmes par an. Or, aujourd’hui, on a en moyenne seulement 1 000 cas portés devant les tribunaux et à peine 80 condamnations.
Ne craignez-vous pas des dénonciations abusives ?
Le fait de créer autour de quelqu’un un environnement intimidant, offensant ou humiliant, peut être prouvé, non seulement par la victime, mais aussi par ses collègues, si les faits ont lieu dans le cadre du travail, là où on recense le plus de cas. Par ailleurs, les améliorations du texte permettent aux délégués du personnel, au médecin du travail, d’intervenir auprès de la direction. Chacun doit être dans un rôle d’alerte, et doit pouvoir apporter des éléments de preuve. Notre objectif est que les personnes victimes de harcèlement ne se sentent plus isolées.
Dans le cadre d’un entretien d’embauche, comment différencier la blague de mauvais goût d’un chantage sexuel ?
Aller devant les tribunaux sur la base d’un harcèlement sexuel n’est pas un acte facile. Les dépôts de plainte de mauvaise foi sont rarissimes. La procédure est si complexe, et les sanctions précédentes étaient si faibles, que beaucoup de personnes ont renoncé à porter plainte. Avant, moins de 10 % des procès aboutissaient à une peine. L’amende moyenne s’élevait à 1 000 €, sur 15 000 € maximum, et les peines d’emprisonnement étaient toujours prononcées avec sursis et sur des petites durées. N’allez pas croire que quelqu’un va porter plainte parce qu’on lui a fait une blague graveleuse. C’est un véritable parcours du combattant, qui est en soi une souffrance.
Selon l’association européenne contre la violence faite aux femmes, 9 % des dossiers instruits en 2011 mettent en cause un élu. Il n’y a pas 9 % d’élus ni en France, ni dans le monde professionnel. Comment vous analysez ce chiffre ?
Il y a une nécessité absolue des responsables politiques de montrer l’exemple. Et c’est pour cela que le vote à l’unanimité, par le Sénat et l’Assemblée nationale, du tout premier texte de la mandature envoie un signe concret aux élus. Bientôt, mon ministère va lancer une grande campagne nationale de sensibilisation sur le harcèlement sexuel, afin que l’on puisse continuer à en parler et élever le seuil d’intolérance à ce phénomène.
Quels sont vos futurs projets au ministère des Droit des femmes ?
Mon premier chantier sera l’égalité professionnelle, car contrairement aux idées reçues, les inégalités entre hommes et femmes ont eu tendance à se creuser ces dernières années. Nous devons trouver de nouvelles méthodes pour nous attaquer à l’écart moyen de 27 % de rémunération qui existe entre les deux sexes. Il ne s’agit pas de créer de nouvelles lois. Ma priorité sera de faire appliquer celles qui existent. Il y a un gros travail d’accompagnement à mener auprès des branches professionnelles, des entreprises, des syndicats et des services de l’État.
Quel sera le rôle du « M. Égalité » que vous souhaitez mettre en place dans chaque ministère ?
Dans chaque ministère, un haut fonctionnaire devra veiller à l’application de l’égalité hommes-femmes. Dans la gestion des ressources humaines, mais aussi dans les politiques publiques qui relèvent de son secteur. Chaque projet de loi ou décret sera soumis à une étude d’impact, afin de s’assurer qu’aucun des deux sexes n’est lésé par rapport à l’autre. Ces études d’impact, publiées sur le site Internet du ministère des Droits des femmes, feront l’objet d’une évaluation contradictoire par des chercheurs.
Quand la loi a été abrogée le 4 mai, vous êtes-vous dit « Ca, c’est un travail pour moi » ?
Non. Je n’osais même pas espérer devenir ministre. En s’engageant sur sa création, François Hollande a fait le pari de faire renaître une force qui était endormie dans notre pays. Je veux qu’après ce quinquennat, il ne vienne à l’esprit de personne de composer un gouvernement sans ministère des Droits des femmes.
Propos recueillis par Pierre LE BAUD.
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bonjour
je pense que les pressions sont encor plus nombreuses sur les personnes en état de précarité si le nombre global pour les faits de harcélements est de 2% je suis certain que le chiffre est plus élevé vis a vis des femmes en situation difficiles ce qui est encor plus scandaleux et on trouve dans ces cas des petits “chefaillons” qui abusent de leur soit disant pouvoir ceux là il ne faut pas les louper….
cordialement
Madame la Ministre,
En nous créant, Dieu nous a doté d’un instinct sexuel, les femmes commes les hommes.De plus,erreure fatale, il lui a ajouté le plaisir Mais malheureusement les hommes plus addict que les femmes et chez certains hommes plus que chez d’autres. Cela implique un contrôle de tous les instants et certains n’y arrivent pas. Vous ne les controlerez pas juridiquement, mais psychologiquement, voir médicalement, comme pour tous les excès de comportement. Le reste, c’est du baratin. Respectueusement.