Premiers Entretiens Jean Zay – Discours de la ministre

Ce mercredi 13 avril 2016, le sociologue Fabien Truong était le premier invité des Entretiens Jean Zay, organisés par le Ministère de l’Éducation Nationale en partenariat avec The Conversation France et Le Monde Idées, Retrouvez ici le discours de la ministre, Najat Vallaud-Belkacem :

Lancement par la ministre Najat VALLAUD-BELKACEM, en présence de Fabien TRUONG, du cycle de rencontres "Les entretiens Jean Zay", au ministère de l'education nationale, le mercredi 13 avril 2016 - © Philippe DEVERNAY

Merci à toutes et à tous d’avoir accepté notre invitation, ce soir, pour cette première séance des Entretiens Jean Zay, ici, rue de Grenelle, dans une ambiance que nous avons voulu chaleureuse, intime, conviviale, propice avant tout, à la liberté de penser, de parler, et à l’échange d’idées.

Merci, cher Fabien Truong, d’avoir accepté d’être notre premier invité.

Merci à Conversation France, à Didier Pourquery et à toute son équipe, de nous avoir immédiatement suivi pour nous accompagner en partenaire dans l’organisation de ce nouveau cycle de rencontres. Le projet éditorial de votre média indépendant, 100% numérique, qui associe enseignants-chercheurs et journalistes, est un outil formidable à la fois pour promouvoir l’excellence de la recherche et de l’université françaises, mais aussi montrer à quel point les savoirs et les connaissances qu’elles produisent peuvent être utiles à la compréhension de l’actualité, les mutations de notre société, et répondre à cette forte aspiration de la part de nos concitoyens d’être informés différemment, d’accéder à la complexité du monde d’aujourd’hui, avec les moyens d’aujourd’hui, adaptés aux contraintes d’aujourd’hui.

Merci aussi au journal Le Monde, et en particulier à Nicolas Truong, journaliste, chef du service Idées et débats, d’avoir également accepté d’être notre partenaire dès le début sur ce projet auquel je tiens beaucoup. Merci d’être-là, et de vous impliquer à nos côtés sur le long terme, pour contribuer à ce que nous considérons ensemble comme essentiel, je crois, c’est à dire une plus large diffusion des savoirs, une plus grande circulation des idées, une reconnaissance plus large, aussi, du talent de nos chercheurs, écrivains, philosophes, intellectuels et savants, notamment en sciences humaines et sociales.

Alors, « Les entretiens Jean Zay », de quoi s’agit-il ?

Dans le fond, rien de plus simple, mais encore faut-il ne jamais cesser de l’affirmer : le savoir, l’expertise scientifique, les connaissances issues du temps long de la recherche et de la réflexion sont ce que nous avons de plus précieux aujourd’hui, dans une société saturée d’informations, surmédiatisée, asphyxiée par l’instantanéité, dans laquelle bien souvent toutes les opinions finissent par se valoir et se confondre, sans hiérarchie de valeurs, alors même que, jamais, nous n’avons autant eu besoin d’y clair sur toutes les grandes questions de société qui font notre réalité sociale, culturelle, technologique, politique, et qui feront, par leur transformation, notre avenir à toutes et à tous.

Si nous ne voulons pas subir à le cours de choses, nous avons besoin de temps, de réflexion, de recul, de mise en perpective, d’échanges, de frotter nos idées et nos convictions avec des points de vue différents, de croiser les disciplines et les cultures, nous avons besoin de confronter ce que nous croyons savoir avec ce que d’autres ont pu découvrir ailleurs, par d’autres moyens, dans nos laboratoires de recherche, par exemple, à l’Université, mais aussi dans les revues, les colloques et, bien sûr, dans les livres, dont nous avons la chance, en France, qu’ils soient encore écrits, publiés, traduits, distribués toujours si nombreux, et de si grande qualité.

Nous avons besoin, dans une époque qui reste difficile pour la vie idées, d’aider à l’émergence d’une nouvelle scène intellectuelle, d’une nouvelle générations de chercheurs impliqués, engagés dans le débat public, qui nous aideront, à leur tour, à sortir du déclinisme, du fatalisme, de la nostalgie réactionnaire  qui nourrit, avec l’ignorance, toutes les peurs, toutes les angoisses, tous les replis qu’ils soient identitaires, culturels ou idéologiques.

Nous ne pouvons nous contenter, en effet, des quelques rares figures, précieuses par ailleurs, qui font si souvent la une des médias à quelques-uns, et prennent toute la place dans les colonnes de nos journaux. Nous avons besoin de renouveau, de diversité, de multiplicité, de jeunesse, de points de vue minoritaires et audacieux dans cette vie des idées qui constitue une part si importante du débat démocratique, mais qui est parfois négligée, au profit de la polémique, de l’anecdote, de la surface des choses.

Je le constate, croyez-moi, dans le domaine de l’éducation, où le débat contradictoire est parfois réduit à sa plus simple expression, passant sous silence l’essentiel des enjeux. Des enjeux qui, pourtant, nous concerne tous et passionnent nos concitoyens lorsque nous les invitons à prendre leur part dans le débat, et dans la réflexion collective.

Oui, nous avons tous besoin, que nous soyons responsables politiques, acteurs économiques, cadres de la fonction publique, étudiants, salariés, militants associatifs ou citoyens, d’un éclairage sans cesse renouvelé, des savoirs les plus récents et des connaissances les plus actuelles sur la société et le monde qui nous entourent. C’est ainsi, et seulement ainsi que nous aurons, peut-être, quelques idées nouvelles pour l’avenir.

C’est la raison pour laquelle j’ai voulu ce cycle de conférences sous la forme d’entretiens, sous une forme libre, légère, souple et mobile, que nous enregistrons en vidéo, et que nous diffuserons largement.

Nous vous donnerons désormais rendez-vous ici chaque mois, dans des formats différents, avec des personnalités, des générations, de disciplines très différentes qui reflèteront la très grande richesse, la très grande diversité et la très grande qualité de l’université et de la recherche française dont je souhaitais dire aussi, à quel point notre pays est fier.

Vous comprenez pourquoi j’ai souhaité aussi que ces rencontres soient placées sous le signe de Jean Zay, lui qui a non seulement été un grand Ministre de l’éducation, un grand Résistant bien sûr, mais aussi le créateur du CNRS ou du festival de Cannes, qui croyaient en la force des idées, des mots, de la pensée,  de la culture et des idées. Lui, qui croyait en la jeunesse et en l’avenir et qui a tant fait pour amener les jeunes générations à s’armer sur le plan intellectuel, et à s’engager au service de leur pays, au service des valeurs de la République et du progrès.

Je salue d’ailleurs Hélène Mouchard-Zay à qui j’avais demandé l’autorisation morale de cet hommage, et qui nous fait l’honneur de sa présence.

Je vous laisse la parole, je suis très heureuse que Fabien Truong soit notre premier invité tant je considère que ses travaux, et notamment son dernier essai sont importants, précieux sur le plan scientifique, mais aussi sur le plan de l’engagement personnel avec une qualité d’écriture et de sensibilité très rare, qui m’ont beaucoup touchée.

Comment ne pas commencer, ici rue de Grenelle, par une réflexion sur l’éducation, les trajectoires sociales de réussites que permet l’école de la République, mais aussi les échecs qu’elles ne parvient pas à empêcher, tant les inégalités, les mécanismes de reproduction sociale mais aussi les préjugés agissent encore puissamment sur les destins collectifs et individuels, et ce que vous appelez la constitution de nos « identités fines ».

Bonne soirée !

Najat Vallaud-Belkacem,
Ministre de l’Éducation nationale,
de l’Enseignement supérieur et de la Recherche


Photos © Philippe Devernay / MENESR

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