Le projet éducatif territorial, instrument souple et adaptable – Entretien au Courrier des Maires

Éducation nationale Publié le 6 janvier 2015

Dans le cadre de la pérennisation du soutien financier de l'État aux activités périscolaires, le ministère de l’Éducation nationale lance une campagne d'aide à la mise en œuvre des projets éducatifs territoriaux (PEDT). A cette occasion la ministre a accordé un entretien au Courrier des Maires.

La circulaire publiée le 1er janvier indique notamment que les communes disposant déjà d’un projet éducatif local exhaustif peuvent s’en servir comme projet éducatif territorial, en passant par un avenant. La circulaire explicite également le soutien et l’accompagnement que le ministère de l’Éducation nationale se propose de mettre en place pour épauler les élus locaux dans la rédaction de leur PEDT.

Courrier des maires :  Les élus locaux témoignant au Congrès des maires de la mise en place des nouveaux rythmes ont exprimé leur refus de voir l’accès au fonds d’amorçage conditionné à l’élaboration d’un PEDT. Or, c’est précisément ce qu’enjoint la nouvelle circulaire. Ne craignez-vous pas des réactions négatives ?

Najat Vallaud-Belkacem : Ce que j’ai entendu, et que j’ai pu partager aussi avec les nombreux élus locaux que j’ai rencontrés, c’était surtout la demande d’une pérennisation du soutien financier de l’Etat. J’ai également entendu leurs attentes à la fois de simplification du PEDT et d’un accompagnement des services de l’Etat, notamment pour les petites communes et les communes rurales.

A ces demandes, l’article 96 de la loi de finances et la circulaire qui a été publiée le 1er janvier donnent une réponse claire : l’aide de l’Etat est pérennisée. A partir de l’année scolaire 2015-2016, elle sera versée lorsqu’un PEDT aura été établi. Cela répond d’ailleurs aux critiques, que j’avais entendues sur le fonds d’amorçage, relatives au fait que les aides étaient attribuées sans aucune contrepartie.

Avec cette circulaire sur les PEDT, ce que nous avons voulu dire avec les associations d’élus locaux, c’est que les maires ne seront pas laissés seuls pour les établir. Cette circulaire est d’abord une instruction aux services de l’Etat pour qu’ils accompagnent les maires qui souhaiteront mettre en place un PEDT parce qu’ils veulent proposer à chaque enfant de leur commune un parcours éducatif cohérent et de qualité avant, pendant et après l’école.

Plus de 8 300 communes étaient déjà couvertes par un PEDT en 2014, dont 70% de communes de moins de 2 000 habitants. Ce mouvement progresse et, ce que nous ferons en 2015, c’est accompagner les élus qui le souhaitent au plus près du terrain et par de nouvelles ressources. A la fin 2015, j’espère que toutes les communes dotées d’une école seront couvertes par un PEDT. C’est notre intérêt à tous.

    Le PEDT, c’est d’abord une vraie plus-value pour la mise en place des rythmes éducatifs”

Courrier des maires : Si une commune décide de se passer du fonds de soutien, peut-elle également se passer d’élaborer un PEDT ?

Najat Vallaud-Belkacem : Le PEDT est et reste un instrument à l’initiative des communes et des intercommunalités. Elles décideront, aujourd’hui comme demain, de s’engager ou non dans l’élaboration d’un PEDT.

Certaines peuvent décider de ne pas le faire. Dont acte. Mais je ne crois pas que ce soit leur intérêt puisque, au-delà du bénéfice de l’aide financière de l’Etat, il faut voir que le PEDT, c’est d’abord une vraie plus-value pour la mise en place des rythmes éducatifs : c’est un cadre partenarial qui, en réunissant tous les acteurs d’un territoire, permet au maire de faire converger les contributions de chacun au service de la complémentarité et de la continuité entre le temps scolaire et le temps périscolaire.

Pour les maires qui pensent que le PEDT est un instrument trop complexe et trop long à établir et qui hésitent, je veux leur redire que c’est un instrument souple et adaptable à la diversité des situations. Les services de l’Etat seront à leurs côtés pour les conseiller et les accompagner. C’est un engagement que nous avons pris avec Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.

“Toutes les communes répondant aux critères recevront 50 euros par enfant comme cela a été le cas pour plus de 22 500 communes cette année.”

Courrier des maires : Quels sont les critères d’éligibilité au fonds de soutien ? Graduez-vous l’aide en fonction des difficultés du territoire ?

Najat Vallaud-Belkacem : Les critères d’éligibilité au fonds de soutien sont fixés dans la loi. Jusqu’à présent, l’aide était calculée en fonction du nombre d’élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques ou privées sous contrat dont les enseignements sont répartis sur neuf demi-journées par semaine.

A partir de l’année 2015-2016, il faudra également que ces activités périscolaires soient organisées dans le cadre d’un PEDT. Toutes les communes répondant à ces critères recevront 50 euros par enfant comme cela a été le cas pour plus de 22 500 communes cette année.

Pour tenir compte de la difficulté du territoire, une majoration de 40 euros est accordée aux communes relevant de la DSU-cible et DSR-cible et aux communes de l’Outre-mer bénéficiant de la quote-part de la dotation d’aménagement. Les modalités et le calendrier des versements pour l’année 2015-2016 seront définis en janvier et concertés avec les associations d’élus locaux.

Je veux aussi rappeler que l’aide de l’Etat peut se cumuler avec l’aide spécifique de 54 euros par enfant versée par la CNAF. Au total, une aide de 144 euros peut ainsi être versée à une commune.

Courrier des maires : Quels sont les liens entre des projets éducatifs locaux, ou des CLEA préexistants, et les PEDT ? Une collectivité doit-elle réécrire un document, si elle dispose déjà d’un PEL exhaustif ?

Najat Vallaud-Belkacem : Il n’existe pas de PEDT idéal adapté pour toutes les communes. C’est avant tout un outil local proposé par le maire et concerté localement avec l’idée principale de partir de l’offre d’activités périscolaires existante, d’organiser la complémentarité entre les activités scolaires et périscolaires et de pérenniser la collaboration entre tous les acteurs concernés en s’assurant d’un suivi et d’une évaluation.Mais nous ne tenons évidemment pas à rendre les choses plus complexes pour les communes, ni à appauvrir les partenariats qui ont pu déjà se constituer à l’échelle locale pour traiter des questions préscolaires, extrascolaires ou des problématiques d’activités pour la jeunesse.

Nous souhaitons faire en sorte que les communes n’aient pas à écrire de nouveaux documents lorsque cela s’avère inutile. Dans la circulaire, je propose donc pour les communes qui ont déjà conclu un projet éducatif local ou un contrat éducatif local qui correspond à la définition d’un PEDT, qu’elles puissent simplement rédiger un avenant, stipulant que leur PEL ou CEL préexistant vaut PEDT.

“Nous souhaitons faire en sorte que les communes n’aient pas à écrire de nouveaux documents lorsque cela s’avère inutile.”

Courrier des maires : En quoi consistera le conseil des services territoriaux de l’Etat ?

Najat Vallaud-Belkacem : Il faut d’abord souligner que le soutien apporté par l’État existe déjà, notamment au travers des guides pour les maires que nous avons établis et des groupes d’appui départementaux (GAD) qui ont été constitués.

Nous avons voulu, avec mon collègue Patrick Kanner, donner un coup d’accélérateur à cette mobilisation des services de l’État pour fournir du conseil et un accompagnement aux élus qui se lancent dans l’élaboration du PEDT. C’est le sens de la circulaire publiée le 1er janvier et c’est le message que je délivrerai aux recteurs et inspecteurs d’académie que je réunirai le 13 janvier prochain.

“Nous lancerons, d’ici la fin janvier, une banque de ressources en ligne, dédiée aux élus locaux.”

Nous avons prévu pour les cadres de nos deux ministères des formations communes et des ressources pour les aider à accompagner les élus. Il ne s’agit évidemment pas de rédiger des PEDT en lieu et place des élus locaux : chacun doit rester dans sa compétence. Mais si une commune ne dispose pas des ressources en ingénierie nécessaires, l’Etat pourra apporter son conseil et son soutien en aidant notamment à mobiliser des ressources locales.

Peut-être d’autres communes aguerries à cet exercice pourront également apporter leurs expériences. Un travail de mutualisation des bonnes pratiques va être réalisé. C’est pour cela que nous lancerons, d’ici la fin janvier, une banque de ressources en ligne, dédiée aux élus locaux pour leur apporter conseil et solutions. Ce sont tous nos services qui sont mobilisés, au niveau national et local.

Courrier des maires : L’une des demandes récurrentes du terrain, c’est de dégager du temps sur le temps de service des enseignants pour des réunions de concertation, que ce soit pour élaborer le PEDT, le mettre en œuvre ou l’évaluer : est-ce prévu?

Najat Vallaud-Belkacem : Les textes réglementaires d’application de la loi de finances expliciteront les délais laissés aux communes qui souhaitent obtenir l’aide de l’Etat pour rédiger leur PEDT. Nous souhaitons laisser aux communes et intercommunalités le temps de s’organiser et, comme je l’ai dit aux associations d’élus, nous reviendrons vers elles pour discuter des modalités concrètes de versement de l’aide 2015-2016.

C’est bien au niveau du territoire, lors de l’élaboration du PEDT, que les acteurs locaux doivent déterminer les besoins et rendre le PEDT opérationnel. Et c’est à travers ce PEDT que la cohérence entre le programme d’activités périscolaires et les projets d’école sera recherchée. Les directeurs d’école sont consultés, de même que le conseil d’école, qui donne son avis sur le PEDT.

En tout état de cause, le partenariat que nous avons mis en place avec les associations d’élus locaux, avec les fédérations de parents d’élèves, avec les associations partenaires de l’école publique se maintiendra dans le temps. Et nous discuterons évidemment des remontées du terrain, pour faire, éventuellement, évoluer les choses.

“La Cnaf contribuera à l’accès des enfants porteurs de handicap à ces activités en mettant un fonds à disposition des communes.”

Courrier des maires : L’aide aux enfants porteurs de handicap pour accéder aux accueils périscolaires comprend-elle le financement des salaires des auxiliaires de vie sociale (AVS) sur ces temps-là aussi ?

Najat Vallaud-Belkacem : Avec le président de la République, nous avons annoncé – le 11 décembre dernier à l’occasion de la Conférence nationale sur le handicap – que l’Etat et la Caisse nationale d’allocations familiales accompagneront les collectivités territoriales qui souhaitent rendre accessibles les activités périscolaires aux enfants en situation de handicap.

Mon ministère facilitera l’emploi par les collectivités territoriales des auxiliaires de vie scolaire sur les temps périscolaires. De son côté, la Cnaf contribuera à l’accès des enfants porteurs de handicap à ces activités en mettant un fonds à disposition des communes. Ces dernières peuvent solliciter le fonds « publics et territoires ». Les critères d’éligibilité feront l’objet d’une circulaire de la Cnaf courant janvier.


Photo Creative Commons – CC Marc Roussel.

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