Mon objectif, faire progresser l’école mais aussi rendre aux enseignants – Entretien à La Montagne

Éducation nationale Publié le 7 mars 2016

Najat Vallaud-Belkacem, en déplacement ce lundi dans le Puy-de-Dôme, a accepté de répondre à nos questions. Jamais, selon la ministre, l’Éducation nationale n’aura bénéficié d’une telle attention. Consciente que les enseignants ont été beaucoup sollicités ces derniers temps, Najat Vallaud-Belkacem, promet une reconnaissance, en termes de rémunération notamment.

La ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche se rendait ce lundi 7 mars 2016 à l’école Jules-Verne à Clermont-Ferrand où se tiendra une table-ronde sur les nouveaux rythmes scolaires, puis direction le collège des Ancizes, l’après-midi, pour évoquer la lutte contre les addictions.

Vous connaissez les inquiétudes du corps enseignant. Quelles priorités vous donnez-vous d’ici la prochaine rentrée pour apaiser le climat ? Depuis 2012, priorité a été donnée à l’Éducation nationale, devenue premier budget de l’État. D’ici 2017, nous aurons créé les 60.000 postes promis lors de la campagne. Nous avons engagé une profonde refondation de l’école pour avoir des professeurs mieux formés, une pédagogie qui s’assure de la réussite de chacun, des programmes plus cohérents et solides de la maternelle jusqu’au collège, une lutte déterminée contre le décrochage pour garantir à chaque élève la maîtrise de l’essentiel. Nous avons fait beaucoup et demandé beaucoup aux enseignants. Voilà pourquoi ma priorité est que les réformes faites se mettent en place, tout simplement. Mais je veux aussi rendre aux enseignants car ils ont été beaucoup sollicités.

De quelle manière ? Il y a des injustices à réparer, comme la trop faible rémunération des enseignants du premier degré. Ma priorité pour les temps qui viennent est d’améliorer la considération qu’on doit au corps enseignant auquel on demande tant. Je travaille actuellement pour obtenir des augmentations qui me paraissent totalement légitimes.

Que pensez-vous des portiques de sécurité dans les lycées ? Écoutez… La sécurité des élèves est chaque jour une priorité pour moi. Voilà pourquoi nous formons les chefs d’établissement à la gestion de crise. Il leur a aussi été demandé de revoir leur plan de sécurité et d’effectuer des exercices avec leurs élèves pour que chacun connaisse les réflexes à avoir. Tout juste élu, Laurent Wauquiez a décidé de tester des portiques de sécurité. Alors, je le redis, ce type d’expérimentation m’inquiète. D’abord, parce que vous augmentez le risque de stationnement des élèves devant l’établissement, le temps que chacun passe, ce qui en fait des cibles potentielles. Sans parler du coût pour les Régions. Tout ceci me semble contre-productif.

En tant qu’ex-ministre des Droits des femmes, que vous a inspiré la polémique sur le nouvel intitulé du ministère ? J’ai compris la réaction première et spontanée des associations car les femmes ont combattu pour sortir de ce giron social, strictement familial. Mais je peux assurer que Laurence Rossignol est une femme extrêmement engagée pour les droits des femmes et j’ai confiance dans sa capacité à faire en sorte que ces trois sujets s’alimentent sans s’asphyxier. Vous savez, quand j’étais ministre des Droits des femmes, et que j’ai fait adopter des évolutions importantes sur le partage du congé parental entre père et mère ou encore la garantie contre les impayés de pension alimentaire pour les mères seules, il me fallait travailler en permanence avec le ministère de la Famille. Là, Laurence Rossignol aura plus de marges de manœuvre.

Le Parti socialiste n’est pas en grande forme… J’aspire à plus de sérénité. Les débats ont beaucoup tendu les relations. Je le regrette. Mais je crois qu’il ne faut pas se cantonner aux petites phrases, aux polémiques et au buzz, mais plutôt s’attacher au débat constructif. Il est bon de désamorcer et d’ouvrir le dialogue, comme le fait actuellement le gouvernement au sujet de la loi sur le Travail. Mais une fois que le point d’équilibre aura été trouvé, il faudra avancer. Il faut absolument réformer.

Qu’espérez-vous à quelques mois de la présidentielle ? À la fin de ce quinquennat, j’aimerais tout simplement que l’opinion publique prenne conscience de ce qui a été fait. C’est inédit de s’attaquer ainsi aux dysfonctionnements du système éducatif et, dans un contexte de finances publiques aussi tendu, d’avoir augmenté le budget de l’Éducation nationale de presque un milliard par an. C’est un choix politique dont je suis fière. Je regardais récemment les chiffres pour l’Académie de Clermont-Ferrand. Entre 2008 et 2012, elle perdait 600 postes quand bien même elle gagnait 1.700 élèves ! Depuis 2012, nous avons recréé plus de 200 postes. J’aimerais que justice soit rendue, non pas à moi, mais à François Hollande.

Comment voyez-vous votre avenir ? Mon seul objectif est d’agir et de réformer jusqu’au dernier jour de ce quinquennat. J’espère contribuer à la réussite de la gauche au pouvoir et convaincre qu’il va falloir poursuivre ce qui a été engagé depuis 2012 avec François Hollande. Je m’engagerai à fond pour rassembler autour de cet objectif. La suite sera entre les mains des Français. 

Propos recueillis par Florence Chédotal pour La Montagne.