Dans une tribune au « Monde », un collectif de membres du Pacte du pouvoir de vivre, parmi lesquels Laurent Berger (CFDT), Marie-Aleth Grard (ATD Quart Monde), Christophe Robert (Fondation Abbé Pierre) et Najat Vallaud-Belkacem (France terre d’asile), appelle à la responsabilité d’Emmanuel Macron, afin de ne pas laisser la violence gagner la société.
Les fissures se transforment en fractures et la démocratie risque de vaciller. Le recours au 49.3 pour faire adopter le texte sur la réforme des retraites, après des semaines de mobilisation citoyenne en vain, n’est pas seulement un coup de tonnerre politique. C’est une décision périlleuse qui abîme encore un peu plus la démocratie et le dialogue social. Elle contredit la promesse faite par Emmanuel Macron à l’occasion de l’élection présidentielle de « changer de méthode » et de gouverner avec les forces vives de la nation.
La crise démocratique dans laquelle nous sommes et dans laquelle nous nous enfonçons davantage ne touche pas seulement nos institutions. Elle pénalise chaque citoyen et chaque citoyenne. Elle réduit notre pouvoir d’agir et nous fait perdre un temps précieux. Elle risque d’immobiliser la société là où nous avons besoin d’une mise en mouvement collective, concertée et tournée vers l’avenir pour mettre en œuvre les transformations indispensables, notamment en matière de transition écologique et de lutte contre les injustices.
Apaisement et responsabilité
Toutes les énergies seront nécessaires tant qu’elles ne sont pas guidées par la colère et le ressentiment. Aussi l’heure est à l’apaisement et à la responsabilité. Nous, représentants d’organisations de la société civile membres du Pacte du pouvoir de vivre, demandons au président de la République de ne pas promulguer la loi.
Cette décision serait la seule à même de ne pas laisser la violence des actes et des mots gagner la société. Elle est indispensable pour apaiser les esprits, pour redonner corps à notre démocratie. Indispensable aussi pour pouvoir relever collectivement les défis qui nous attendent. Les chantiers à venir – transition écologique, lutte contre la pauvreté, réduction des inégalités, réindustrialisation – nécessiteront de la volonté politique, du travail, de l’ambition, mais aussi de la confiance, de la cohérence et un engagement de chacune et de chacun. Or ces ingrédients ne sont pas réunis dans le contexte actuel.
Il faut retrouver les conditions d’une démocratie sociale vivante. Il faut écouter les besoins, entendre les réalités, prendre en compte les vécus, répondre aux inquiétudes. Il faut aussi fixer le cap pour construire une société tournée vers la justice, le partage, le soin, la solidarité, la protection, qui donne à chacun et à chacune le pouvoir de vivre dignement dans un environnement sain.
Les signataires, membres du Pacte du pouvoir de vivre : Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT ; Sarah Bilot déléguée générale d’Animafac ; Alain Caillé, sociologue, porte-parole du mouvement Les Convivialistes ; Suzanne de Cheveigné, présidente desCompagnons bâtisseurs ; Daniel Goldberg, président de l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss) ; Laurent Grandguillaume, président deTerritoires zéro chômeur de longue durée ; Marie-Aleth Grard, présidente d’ATD Quart Monde ; Claude Grivel, président de l’Union nationale des acteurs développement local (Unadel) ; Ghislaine Hierso, trésorière de l’association Les Petits Débrouillards ; Henri Lastenouse, secrétaire général deSauvons l’Europe ; Amandine Lebreton, directrice duPacte du pouvoir de vivre ; Philippe Lemoine, président du Forum modernité ; Marc Pili, délégué général deVacances ouvertes ; Jean-Paul Raillard, président duréseau Envie ; Jacky Richard, coordinateur du Pacte civique ; Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre ; Jérôme Saddier, président de la Chambre française de l’économie sociale et solidaire (ESS) ; Claire Thoury, présidente du Mouvement associatif ; Tarik Touahria, présidente de la Fédération des centres sociaux et socioculturels de France ; Najat Vallaud-Belkacem, présidente de France terre d’asile ; Stéphane Vincent, cofondateur et délégué général deLa 27e région.
Tribune publiée dans le journal Le Monde, le 18 mars 2023.
Crédit photo: Julien Daniel
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