Pour faire entendre la voix des Afghanes – tribune dans ELLE

France terre d'asile Réfugiés Publié le 2 septembre 2023

« Je ne comprends pas pourquoi nous avons été créées. Pourquoi sommes-nous nées dans ce pays?» Ce cri de désespoir de Soraya, une des femmes interviewées par Solène Chalvon-Fioriti dans son poignant documentaire «Afghanes », résume la terrible réalité vécue par les temmes en Afghanistan depuis deux ans et le retour des talibans au pouvoir.

Aujourd’hui, les femmes n’ont plus le droit de se rendre dans les parcs et jardins publics. Elles ne peuvent plus se rendre dans les salles de sport ou les bains publics. Les portes de l’université leur sontfermées et l’école leur est interdite après 12 ans. Elles ne peuvent plus non plus travailler dans la plupart des secteurs. Elles sont intimidées, battues et persécutées dès qu’elles osent opposer une résistance. Récemment, les salons de beauté, un des derniers espaces de socialisation et de liberté ontdû baisser le rideau. Le pouvoir taliban efface les femmes de l’espace public, il les bâil-lonne. La parole des femmes afghanes est confisquée, leurs rêves sont brisés.
Dans un rapport publié fin mai, Amnesty International témoigne qu’il n’y a pas de pire pays aujourd’hui pour naître femme que l’Afghanistan. L’organisation estime même que les persécutions à leur encontre sont si graves et systématiques qu’elles relèvent de crimes contre l’humanité.

Dès lors, que pouvons-nous faire, nous, Français et Européens ? Comment sortir du sentiment d’impuissance horrifiée qui nous envahit toutes et tous ? Des solutions existent, marginales sans doute face à l’ampleur de l’horreur, mais néanmoins indispen-sables. Un petit nombre de femmes afghanes parviennent à fuir l’Afghanis-tan, au risque souvent de leur vie et de celle de leur entourage. Mais elles restent ensuite bloquées dans les pays limitrophes, notamment au Pakistan ou en Iran, où elles sont exposées à de nouveaux dangers. Elles y sont harcelées par les autorités, dépourvues de soutien et contraintes de vivre dans le plus grand dénuement. Avec des journalistes, chercheuses et défenseuses des droits des femmes dans le cadre du collectit Accueillir les Afghanes, soutenu par près de 350 personnalités, nous nous mobilisons depuis des mois pour continuer à faire entendre la voix de ces femmes et les aider à trouver protection ailleurs.

Nous demandons à la France d’ouvrir un programme d’accueil humanitaire pour ces femmes seules qui ont réussi à rejoindre le Pakistan, en leur délivrant des visas et en organisant leur accueil.
Mais nous sommes toujours dans l’attente d’un engagement concret du gou-vernement. Pour les Afghanes, la diplomatie féministe reste un slogan.

Après la chute de Kaboul, faisant honneur à ses principes et à ses valeurs, la France s’était mobilisée pour évacuer plusieurs milliers d’Afghans.
Elle doit prolonger cet effort en le ciblant particulièrement sur les femmes seules et vulnérables qui sont déjà par venues à fuir. Nous savons que notre pays en a les moyens et la capacité.
Nous sommes prêts à y travailler avec les autorités francaises. N’abandonnons pas ces femmes. Protégées, elles porteront aussi la voix de leurs sœurs réduites au silence.

•accueillirlesafghanes.org

Tribune publiée dans Elle, le 31 août 2023.