ll faut donner le goût des maths aux élèves – Entretien à 20 Minutes

Presse Éducation nationale Publié le 4 décembre 2014

Les élèves français n’ont pas la bosse des maths. Alors qu’un mathématicien sur quatre récompensés par la médaille Fields vient de l’Hexagone, 40.000 élèves sont touchés chaque année par l’innumérisme (équivalent de l’illettrisme pour le calcul) selon l’enquête Pisa de l’OCDE de décembre 2013. La ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem présente au journal 20 minutes sa stratégie mathématiques pour redresser la barre.

La France se situe au 25e rang du classement de l’OCDE réalisé sur 65 pays concernant les acquis de ses élèves en maths. Comment expliquez-vous cela?

C’est un paradoxe de notre pays. Alors que la France égale les Etats-Unis concernant le nombre de médailles Fields, le niveau des élèves français baisse en mathématiques. A la fin du collège, 45% des élèves ont des compétences fragiles dans ce domaine. Avec en outre un fort déterminisme social, car ce sont les élèves issus des milieux les plus défavorisés qui présentent les moins bons résultats en maths. C’est pour cela que nous avons travaillé sur cette stratégie globale, qui s’appuiera sur de nouveaux programmes de mathématiques à l’école et au collège, une meilleure formation des enseignants dans ce domaine et un travail sur l’image de cette matière. Il faut donner le goût des maths aux élèves.

Comment rendre l’enseignement des maths plus ludique?

Dans le cadre des nouveaux programmes, nous allons développer des approches nouvelles des maths. L’introduction de l’algorithmique* permettra par exemple de mieux former les élèves au raisonnement déductif. Le numérique sera aussi mis à profit pour permettre aux élèves d’effectuer davantage d’exercices avec des niveaux différenciés et d’avancer aussi chacun à leur rythme.

Comment rendre l’approche des maths plus concrète?

Il faut proposer aux élèves des questions qui font sens pour eux dans leur approche des mathématiques, en utilisant des problèmes ancrés dans le réel. Nous allons aussi développer plus d’actions éducatives, en lien avec des associations scientifiques telles que «Les petits débrouillards», mais également dans le cadre de la Semaine des mathématiques. Aujourd’hui, près de 10% des jeunes Français de 17 ans rencontrent des difficultés pour conduire un calcul dans des situations simples. Les outils mathématiques sont indispensables au quotidien. Il faut permettre aux élèves d’en prendre conscience.

Vous souhaitez aussi créer des passerelles entre les maths et d’autres matières, en quoi cela va consister concrètement?

Toutes les disciplines sont concernées par l’acquisition des compétences et des techniques fondamentales des mathématiques, qu’il s’agisse des grandeurs, des pourcentages, de la lecture de graphiques etc. Par exemple, un professeur d’éducation physique et sportive peut faire mesurer les performances sportives en mettant en relation temps et distance, un professeur de géographie, travailler sur la compréhension des échelles.

Chaque année, des enseignants de mathématiques manquent à l’appel. Comment comptez-vous susciter davantage de vocations dans cette discipline?

Nous allons actionner trois leviers: le nombre de postes ouverts aux concours de mathématiques (1.897 postes au CAPES et à l’agrégation externes pour 2015), qui sera maintenu à un niveau élevé; la création d’une option «informatique» au CAPES de mathématiques pour attirer de nouveaux candidats, et un appui aux enseignants contractuels pour leur préparation aux concours.

Les carrières scientifiques sont encore l’apanage des garçons. Comment attirer davantage de jeunes femmes vers ces filières?

Nous allons nous appuyer sur le nouveau service public régional de l’orientation et sur les associations, pour promouvoir les filières scientifiques et techniques auprès des filles. Un effort particulier sera porté à l’identification des stéréotypes sexués dans l’écriture des exercices et à l’accompagnement des enseignants sur ce sujet. La France compte de brillantes mathématiciennes comme Laure Saint-Raymond, Sylvia Serfaty et Nalini Anantharaman qui ont reçu en 2012 le très prestigieux prix Henri Poincaré. En mathématiques, les filles peuvent réussir aussi bien que les garçons. Les dix mesures de la stratégie mathématiques y contribueront.


*L’algorithmique est un processus permettant de résoudre un problème en un nombre défini d’étapes.

Propos recueillis par Delphine Bancaud pour 20 Minutes.

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