Après les attentats qui ont visé la République au cœur, Najat Vallaud-Belkacem a présenté onze mesures symboles de la grande mobilisation de l'École pour les valeurs de la République, ce jeudi 22 janvier 2015. Laïcité et transmission des valeurs républicaines, citoyenneté et culture de l'engagement, lutte contre les inégalités et mixité sociale, mobilisation de l'Enseignement supérieur et de la Recherche sont au centre de ces mesures. La grande mobilisation pour les valeurs de la République est celle de toute l'École, y compris l'enseignement agricole et l'enseignement privé sous contrat.
L’École est un révélateur des tensions qui traversent la société française et des inégalités qui la marquent. Le délitement du lien social au cours des trente dernières années de crise économique n’a pas épargné l’École. Le sentiment de désespérance, l’accroissement des inégalités et la prévalence du déterminisme social, l’incapacité collective à prévenir le décrochage scolaire endémique d’une partie de notre jeunesse, ont entamé la mission d’égalité de l’École. Les discriminations, l’écart entre les valeurs affichées et les réalités vécues, les replis identitaires, les velléités communautaristes, les logiques d’entre-soi ont affaibli son ambition de fraternité.
Dans une société en perte de repères et caractérisée par une forme de relativisme ambiant qui favorise amalgames et indifférences, l’École peine aujourd’hui à assurer les missions que la République lui a confiées, transmettre des connaissances et être un creuset de la citoyenneté, et à susciter la confiance des élèves et des familles.
Après les attentats qui ont visé le coeur des valeurs républicaines, la mobilisation du peuple français est porteuse d’une exigence vis-à-vis de l’ensemble de la société, et singulièrement de l’École dont le rôle et la place dans la République sont inséparables de sa capacité à faire vivre et à transmettre la laïcité.
L’École est, et sera en première ligne, avec fermeté, discernement et pédagogie, pour répondre au défi républicain, parce que c’est son identité et sa mission profonde. École et République sont indissociables. Elles doivent le rester.
La grande mobilisation pour les valeurs de la République est celle de toute l’École, y compris l’enseignement agricole et l’enseignement privé sous contrat.
Retrouvez ci-dessous l’infographie présentant les principales mesures et l’ensemble des mesures de la mobilisation dans le dossier qui suit.
Les 11 mesures
pour
une grande mobilisation de l’École pour les valeurs de la République
Mettre la laïcité et la transmission des valeurs républicaines au coeur de la mobilisation de l’École
La République “a fait” l’École dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Puis l’École “a fait” la République en construisant un savoir-être, une capacité d’argumentation, une culture de la raison et du jugement, en transmettant les valeurs républicaines et humanistes et en favorisant l’adhésion à ces valeurs.
[Mesure 1]
Renforcer la transmission des valeurs de la République
- Un plan exceptionnel de formation continue des enseignants et des personnels d’éducation sera déployé pour les aider à aborder avec les élèves les questions relatives à la citoyenneté (française et européenne), à la laïcité, à la lutte contre les préjugés.
Avant la fin de l’année scolaire, 1 000 premiers formateurs pour le premier et le second degré (inspecteurs, professeurs, professeurs documentalistes, directeurs d’école, chefs d’établissement, conseillers principaux d’éducation, personnels d’orientation, personnels de santé et sociaux, etc.), seront formés pendant deux jours sur la laïcité et l’enseignement moral et civique, afin qu’ils puissent répondre, dans chaque académie et chaque département, aux besoins de formation et d’accompagnement de leurs pairs.Des formations sur site à l’enseignement laïque du fait religieux ainsi qu’aux usages des technologies numériques et des réseaux sociaux seront proposées, à l’initiative des référents “laïcité” et “mémoire et citoyenneté” et des “référents éducation aux médias”, nouvellement créés, de chaque académie, aux personnels de direction, aux corps d’inspection et aux enseignants.Dans l’enseignement agricole, ces thématiques seront prioritaires dans les documents régionaux de formation, et des actions de formation seront mises en oeuvre par l’École nationale de formation agronomique (ENFA), chargée de la formation des enseignants de l’enseignement agricole technique.
Pour mieux répondre aux besoins de formation des équipes, les correspondants académiques de l’inspection générale de l’éducation nationale (IGEN) et de l’inspection générale de l’administration de l’Éducation nationale, de l’Enseignement et de la Recherche (IGAENR) feront remonter chaque année la typologie des difficultés rencontrées et des besoins exprimés sur le terrain, sur la base desquels l’IGEN et la direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) élaboreront les actions de formation et les ressources pédagogiques appropriées.
- La capacité des candidats “à expliquer et à faire partager les valeurs de la République” sera évaluée systématiquement dans les concours de recrutement.
- Les écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE) seront mobilisées pour la formation à la laïcité des futurs enseignants et éducateurs.
Elles feront une place prioritaire à l’enseignement de la laïcité et à la lutte contre les préjugés au sein du tronc commun de la formation de tous les éducateurs et de tous les professeurs du premier comme du second degré, quelles que soient leurs disciplines d’enseignement.
Un module sur l’enseignement laïque du fait religieux, élaboré notamment avec l’Institut européen en sciences des religions et des ESPE, sera mis à disposition de l’ensemble des ESPE et de l’ENFA. Un séminaire de toutes les ESPE avant l’été permettra de s’assurer de l’homogénéité des formations dispensées.
- Des ressources pédagogiques nouvelles seront produites et mises à disposition des équipes éducatives et pédagogiques :
– des ressources sur la pédagogie de la laïcité et pour l’enseignement laïque du fait religieux :
– des ressources pour les formateurs ;
– deux nouveaux parcours de formation sur la plateforme M@gistère dédiés respectivement aux professeurs du premier degré et à ceux du second degré sur l’enseignement du fait religieux, s’ajoutant à celui sur la laïcité, déjà disponible ;
– un livret rassemblant les contenus pédagogiques essentiels (textes, Charte), les liens vers les ressources de formation, des questions/réponses juridiques sur les sujets sensibles relatifs à la laïcité ;
– de nouveaux contenus pédagogiques vidéos pour la prochaine rentrée produits avec le réseau Canopé : série de films courts présentant les combats historiques pour la laïcité, proposant des incarnations dans des figures du passé et actuelles, etc.- la mise en ligne d’un portail de ressources pédagogiques dédié à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme, en lien avec la délégation interministérielle à la lutte contre le racisme et l’antismétisme (DILCRA),– la publication d’un livret opérationnel de prévention et de lutte contre les phénomènes de radicalisation, préparé en concertation interministérielle.
- Il est demandé au Conseil supérieur des programmes de renforcer les contenus de l’enseignement laïque du fait religieux et de l’éducation aux médias et à l’information dans les programmes de l’école élémentaire et du collège.
[Mesure 2]
Rétablir l’autorité des maîtres et les rites républicains
- Les règles de civilité et de politesse doivent être apprises et respectées à l’École. Lors de l’inscription des élèves et lors de la rentrée, le règlement intérieur, qui précise ces règles de civilité et de politesse, mais aussi la Charte de la laïcité seront présentés et expliqués aux élèves et à leurs parents, qui signeront ces documents pour manifester leur engagement à les respecter.
- Tout comportement mettant en cause les valeurs de la République ou l’autorité du maître fera l’objet d’un signalement systématique au directeur d’école ou au chef d’établissement, d’un dialogue éducatif associant les parents d’élèves et, le cas échéant, d’une sanction. Aucun incident ne sera laissé sans suite.
- Pour renforcer l’apprentissage des droits et des devoirs, le recours aux mesures de responsabilisation sera fortement développé. Dans ce cadre, l’élève doit réfléchir à la portée de son acte tant à l’égard de la victime éventuelle que de la communauté éducative. Le chef d’établissement, le responsable légal de l’élève et le responsable de la structure d’accueil, quand elle se déroule en dehors de l’établissement, signent un document définissant les modalités d’exécution de la mesure de responsabilisation. Les partenariats conclus au niveau national avec la Croix Rouge, l’UNICEF, l’Association de la fondation étudiante pour la ville (AFEV) et l’Institution de formation, d’animation et de conseil (IFAC) offrent un cadre pour la mise en place de mesures de responsabilisation se déroulant à l’extérieur de l’établissement.
- Ces dispositions seront accompagnées d’une mobilisation dans la durée des cadres de l’Éducation nationale (inspecteurs généraux, recteurs, IA-DASEN, IA-IPR, IEN, chefs d’établissement), et de l’enseignement agricole (directeurs régionaux de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt, inspecteurs de l’enseignement agricole, directeurs d’établissement), des référents mémoire et citoyenneté, des référents laïcité, des proviseurs vie scolaire auprès des équipes éducatives. Chaque recteur ou DRAAF élaborera un schéma de mobilisation des IA-IPR établissements et vie scolaire, des proviseurs vie scolaire, des corps d’inspection, des conseillers techniques et des équipes mobiles de sécurité pour apporter un soutien aux équipes pédagogiques et éducatives en difficulté.
- Le rétablissement de l’autorité des maîtres passe également par la compréhension et la célébration des rites républicains et des symboles de la République (hymne national, drapeau, devise).
- Une Journée de la laïcité sera célébrée dans toutes les écoles et tous les établissements le 9 décembre.
- Les projets d’écoles et d’établissements détailleront les modalités de la participation active des élèves aux journées ou semaines spécifiques (semaine de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, semaine de l’engagement), commémorations patriotiques, participation collective à des concours et à des “olympiades”.
- L’organisation d’un temps annuel de rencontre et d’échange avec l’ensemble de la communauté éducative (cérémonie de remise de diplômes, valorisation des réussites des élèves, spectacle de fin d’année, etc.) doit être systématisée.
[Mesure 3]
Créer un nouveau parcours éducatif de l’école élémentaire à la terminale : le parcours citoyen
Le parcours sera construit autour :
- Du nouvel enseignement moral et civique, qui entrera en vigueur dès septembre 2015 dans toutes les classes de l’école élémentaire à la classe de terminale, et dans toutes les voies du lycée d’enseignement général et technologique et du lycée professionnel. Il représentera, sur l’ensemble de la scolarité d’un élève, 300 heures dédiées.
L’enseignement moral et civique doit permettre aux élèves par une pédagogie active et le recours aux supports audiovisuels, de comprendre le bien-fondé des règles régissant les comportements individuels et collectifs (principe de discipline), de reconnaître le pluralisme des opinions, des convictions et des modes de vie (principe de coexistence des libertés), et de construire du lien social et politique (principe de la communauté des citoyens). Il favorise le respect des droits et de la loi, l’égale considération des personnes, la solidarité, l’entraide, la coopération, le sens de l’intérêt général et de la participation à la vie démocratique. Il intègre de manière transversale les problématiques de lutte contre le racisme, contre l’antisémitisme, contre les préjugés et contre toutes les formes de discrimination, les notions de droits et de devoirs, le principe de laïcité. - D’une éducation aux médias et à l’information prenant pleinement en compte les enjeux du numérique et des ses usages. Indissociable de la transmission d’une culture de la presse et de la liberté d’expression, l’éducation aux médias et à l’information est un enseignement intégré de manière transversale dans les différentes disciplines. Il doit apprendre aux élèves à lire et à décrypter l’information et l’image, à aiguiser leur esprit critique et à se forger une opinion, compétences essentielles pour exercer une citoyenneté éclairée et responsable en démocratie.
Le ministère veillera à ce qu‘un média – radio, journal, blog ou plateforme collaborative en ligne – soit développé dans chaque collège et dans chaque lycée. Les professeurs documentalistes seront tout particulièrement mobilisés à cette fin. C’est en effet en engageant les élèves eux-mêmes dans des activités de production et de diffusion de contenus, notamment à travers les réseaux sociaux et les plateformes collaboratives en ligne, qu’ils prendront le mieux conscience des enjeux attachés à la fiabilité des sources, à l’interprétation des informations et à la représentation de soi en ligne.
Dans l’enseignement agricole, cette éducation aux médias et à l’information sera renforcée dans le cadre de l’éducation socioculturelle.
Le Centre de liaison de l’enseignement et des médias d’information (CLEMI) restera pleinement engagé sur ces enjeux pour le ministère. - De l’enseignement aux élèves du jugement, de l’argumentation et du débat dans les classes dès l’école élémentaire. Dans le second degré, toutes les disciplines doivent être mobilisées à cette fin. Les enseignants seront formés et accompagnés.
- De l’inscription des élèves de l’enseignement professionnel et des apprentis pendant leurs parcours de formation à des ateliers débats et philosophiques dans le cadre de l’enseignement moral et civique ; à des activités sociales et civiques de l’entreprise où se déroulent les périodes de formation en milieu professionnel et les périodes d’alternance ; à l’engagement associatif et l’implication dans les organisations associatives professionnelles.
- De la préparation en amont de la Journée défense et citoyenneté (JDC) dans les établissements avec les lycéens.
- La participation et les initiatives des élèves seront développées :
– Développement des “conseils d’enfants” dès l’école primaire, des conseils de la vie collégienne et soutien renforcé aux conseils de la vie lycéenne.
– Encouragement des actions éducatives dans le cadre des projets éducatifs territoriaux (par exemple participation des élèves à des conseils municipaux d’enfants).
– Renforcement des capacités d’initiative des associations lycéennes et mobilisation de moyens nouveaux à destination des journaux lycéens et des activités de création et d’animation médias en favorisant les projets partenariaux avec le monde des médias et le monde économique.
– Relance de la semaine de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, fin mars, pour en faire un temps fort de mobilisation de la communauté éducative et de l’ensemble de la société civile. Renforcement de la semaine de l’engagement en septembre, en lien avec les partenaires associatifs.
– Valorisation de l’engagement associatif des élèves, de l’implication auprès de leurs pairs qui ont besoin de soutiens variés (élèves nouvellement arrivés en France, élèves en difficulté, élèves en situation de handicap), etc. La vice-présidence des associations sportives par les élèves sera systématisée, et les prises de responsabilité au sein des associations sportives valorisées. Les formations de jeunes coachs et de jeunes arbitres seront développées. Les expériences d’engagement vécues par les élèves pendant leurs temps de loisirs et de vacances seront encouragées (cf. plan du ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports). - Les actions relatives à la formation du futur citoyen et à la promotion des valeurs de la République et de la laïcité seront inscrites systématiquement dans les projets d’école et les projets d’établissement. Ces actions seront particulièrement valorisées et explicitées auprès des parents d’élèves. Toutes les écoles et tous les établissements devront, d’ici la fin de l’année scolaire, réécrire leurs projets d’école et d’établissement pour y intégrer ces éléments. Ces projets détailleront également les modalités du parcours citoyen.
Le parcours citoyen sera évalué à la fin de la scolarité obligatoire selon des modalités qui seront définies au printemps. De manière complémentaire, les jeunes de plus de 16 ans, poursuivront leur parcours citoyen afin de préparer pleinement et de solenniser leur entrée dans la République (cf. plan du ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports).
Développer la citoyenneté et la culture de l’engagement avec tous les partenaires de l’École
L’École n’est pas la seule responsable, ni la cause de tous les maux qui la touchent. Elle subit des évolutions sociales et sociétales plus larges. Mais c’est en son sein, avec les différentes composantes de la communauté éducative et l’ensemble de ses partenaires (autres services publics, collectivités territoriales, monde associatif, monde économique), qu’un certain nombre de solutions doivent être trouvées. Les valeurs doivent vivre dans des actes pédagogiques concrets, et pas simplement dans la déclamation de principes qui, parfois, ne s’incarnent pas assez dans le quotidien des élèves.
[Mesure 4]
Associer pleinement et développer les temps d’échange avec les parents d’élèves
- Un comité départemental d’éducation à la santé et à la citoyenneté sera créé, compétent pour le premier et le second degré. Instance de mobilisation, associant l’ensemble de la communauté éducative, personnels enseignants, non enseignants, notamment les personnels “santé-sociaux” et fédérations de parents d’élèves, ce comité permettra de nourrir des projets départementaux, en particulier par l’examen des initiatives issues des projets d’école ou d’établissement. Il sera une instance de réflexion sur les protocoles de communication vis-à-vis des parents d’élèves lors des situations d’urgence.
- Les espaces et/ou temps des parents seront développés dans chaque école et établissement. La relation de confiance et la compréhension mutuelle entre les parents et l’École constituent un enjeu déterminant pour la réussite de tous les enfants aux plans scolaire, social et citoyen.
- La généralisation de la “mallette des parents” (prévue dans le cadre du plan “vaincre le décrochage scolaire”), élaborée pour trois moments clés de la scolarité des enfants – l’entrée au CP, où l’enfant apprend à lire, l’arrivée en 6e, pour faciliter le passage au collège, en 3e, pour accompagner les premiers choix d’orientation – sera accélérée par la mise à disposition des chefs d’établissement de moyens renforcés.
- Les proviseurs vie scolaire – conseillers des recteurs pour les questions relatives à l’action éducative, au fonctionnement des établissements et aux relations avec les personnels de direction – seront les référents des associations de parents pour toute difficulté relative au racisme, aux discriminations ou à la remise en cause des valeurs de la République. En lien avec les référents laïcité, ils pourront entreprendre une première médiation en cas de conflit entre des parents et l’École.
[Mesure 5]
Mobiliser toutes les ressources des territoires
- Un partenariat renouvelé avec les collectivités territoriales pour la réussite éducative des jeunes sera mis en place :
– Inclure dans les projets éducatifs territoriaux (PEDT) un volet laïcité et citoyenneté, financé par un fonds d’État dédié à destination des associations de jeunesse et d’éducation populaire.
– Susciter les initiatives des collectivités territoriales pour conduire à la création de nouvelles places d’internat, notamment au niveau du collège, dans le cadre de la politique des internats de la réussite et du programme d’investissement d’avenir (PIA). Ce point sera également prioritaire pour l’enseignement agricole, dont la majorité des élèves sont internes.
– Inclure dans les contrats de ville un axe laïcité et citoyenneté ainsi que la prévention des ruptures sociales et scolaires, l’accompagnement des parents, l’accompagnement des jeunes vers l’insertion et l’emploi, qui associent les missions locales, les maisons des adolescents et les maisons de la justice et du droit.
– Développer les programmes de réussite éducative qui ont montré leur efficacité dans le suivi et l’accompagnement individuel des jeunes, sur tout le territoire et favoriser la participation des acteurs de l’éducation nationale.
– Engager avec les élus la construction d’un cadre commun facilitant la mise en oeuvre du principe de laïcité dans les services publics locaux, avec une vigilance pour que les intervenants auprès des enfants et des jeunes connaissent les principes de la laïcité et s’engagent à les transmettre et à les appliquer fermement. - Les liens avec l’éducation populaire seront renforcés. Le contenu des conventions pluriannuelles d’objectifs des réseaux d’éducation populaire sera redéfini au regard des enjeux actuels, avec le souci de parvenir à des engagements communs de tous les ministères concernés dans un cadre stabilisé et durable. Cette simplification et cette reconnaissance inédite de la part de l’État constitueront une chance de renouveler, en la consolidant, l’intervention de l’éducation populaire dans les territoires les plus fragiles, en confortant leur capacité à porter et transmettre les valeurs de la République.
- Les liens avec les associations de lutte contre le racisme et l’antisémitisme agréées par le ministère ou bénéficiant d’une convention de partenariat seront également redéfinis afin de renforcer la mise en oeuvre de leurs actions éducatives et pédagogiques spécifiquement sur les problématiques du vivre-ensemble, de la lutte contre les préjugés, le racisme, l’antisémitisme, la xénophobie.
- Les partenaires éducatifs agréés du ministère, des professionnels des médias, des associations de lutte contre le racisme et l’antisémitisme et des organisations de jeunesse et d’éducation populaire seront mobilisés pour lutter contre les dérives du relativisme, de la rumeur et de l’obscurantisme dans le cadre d’interventions auprès des jeunes.
- Une réserve citoyenne d’appui aux écoles et aux établissements, sur le modèle de la réserve citoyenne de la Défense, sera créée dans chaque académie sous l’autorité des recteurs. Seront notamment sollicités pour participer à cette réserve les personnes désireuses d’apporter leur concours aux missions de l’École, les bénévoles d’associations partenaires au plan local et les délégués départementaux de l’Éducation nationale (DDEN).
L’ensemble de ces mesures sera mis en œuvre en partenariat étroit avec le ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.
Combattre les inégalités et favoriser la mixité sociale pour renforcer le sentiment d’appartenance dans la République
La réduction des inégalités scolaires passera par de nouvelles mesures en faveur de la mixité et de la mobilité sociales, un engagement renforcé pour la maîtrise du français, et une meilleure prise en compte des enfants en situation de pauvreté. Il faut mettre fin à l’écart que vivent trop d’élèves et leurs parents entre les principes de la République et leurs réalités quotidiennes, ce qui signifie une lutte sans merci contre le déterminisme social, qui est le moteur de la désespérance.
[Mesure 6]
Engager un chantier prioritaire pour la maîtrise du français
- Une évaluation du niveau des élèves en français, à des fins diagnostiques, sera mise en place au début de CE2 pour permettre aux équipes pédagogiques d’identifier les difficultés et de mettre en place une réponse adaptée aux besoins de chaque enfant. Des outils d’évaluation standardisés seront mis à disposition à cette fin.
- La recherche sera mise au service de l’amélioration de l’acquisition du langage dès la petite enfance, afin de conduire tous les élèves à un premier niveau de maîtrise de la lecture et de l’écriture à la fin du CE2.
La DGESCO mobilisera son conseil scientifique pour rendre accessibles aux acteurs de terrain les résultats de recherches et d’expériences en France et à l’étranger, notamment sur l’apprentissage de la lecture et la compréhension de l’écrit, affiner les analyses de situation qui existent (rapports des inspections générales, travaux de la DEPP notamment), et promouvoir les recherches et expérimentations intégrant un suivi des pratiques ainsi promues.Les apprentissages des élèves allophones nouvellement arrivés en France seront facilités par l’enseignement spécifique du français langue seconde et la mise en place de dispositifs d’inclusion scolaire. C’est en effet la scolarisation en milieu ordinaire qui donne les meilleurs résultats éducatifs. - Les moyens du dispositif “Ouvrir l’École aux parents pour la réussite des enfants” seront renforcés, par un cofinancement avec le ministère de l’Intérieur. Ce dispositif a pour objectif de donner aux parents étrangers allophones les moyens d’aider leurs enfants dans leur scolarité, par une meilleure connaissance de l’institution scolaire, des droits et des devoirs des élèves et des parents, un apprentissage de la langue française et une meilleure compréhension des principes, des valeurs et des usages de la société française, pour une meilleure intégration. Alors que le dispositif a été recentré sur les primo-arrivants, le fonds Éducation nationale permettra de prendre en charge les parents allophones présents depuis plus longtemps sur le territoire.
[Mesure 7]
Accélérer la mise en œuvre du plan de lutte contre le décrochage
- Les recteurs sont mobilisés pour décliner opérationnellement la “stratégie de lutte contre le décrochage” et pour être en première ligne avec les autres services de l’État et ceux de la région, pour mettre en œuvre le “droit au retour en formation”. Il s’agit de faire accéder à la qualification – et donc à l’insertion professionnelle – les 620 000 jeunes sortis du système scolaire, aujourd’hui ni en emploi ni en formation, et les 140 000 jeunes qui chaque année quittent l’École sans qualification.
Des moyens en crédits budgétaires et en ressources humaines seront déployés à cette fin. - Une campagne de communication sera mise en place en direction des jeunes bénéficiaires des nouvelles dispositions du droit au retour en formation.
[Mesure 8]
Renforcer les actions contre les déterminismes sociaux et territoriaux
- Une politique active de mixité pour agir sur la composition des collèges sera mise en place grâce aux nouvelles dispositions législatives et réglementaires.
– En concertation avec les collectivités compétentes, un état des lieux sera établi en 2015- 2016 en matière de mixité sociale au sein des collèges publics et privés sous contrat. Ce diagnostic partagé doit pouvoir déboucher sur la définition d’objectifs en matière de mixité sociale au sein des collèges publics, à l’échelle du département, mais également à l’échelle de territoires infra-départementaux identifiés comme pertinents.
– De nouveaux secteurs de recrutement des collèges seront définis pour y regrouper plusieurs établissements là où c’est pertinent.
– Les directions des services départementaux de l’Éducation nationale mettront en place une procédure d’affectation des élèves permettant de renforcer la mixité sociale des établissements des nouveaux secteurs de recrutement. - La coopération avec les entreprises et le monde économique sera étendue et valorisée.
– Les initiatives des associations et de milieux professionnels qui mobilisent l’intervention de tuteurs d’entreprise pour l’accompagnement, dans leurs études et leur insertion professionnelle, des jeunes collégiens et lycéens professionnels des quartiers, seront valorisées. Les accords de partenariat seront étendus, notamment dans le cadre de la mise en oeuvre du parcours individuel d’information, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel, afin d’élargir le réseau des établissements bénéficiaires.
– Les partenaires sociaux et les branches professionnelles sont mobilisés pour intensifier les initiatives citoyennes en faveur de l’insertion sociale et professionnelle des jeunes. L’information sur les formes et les effets des discriminations dans l’accueil des jeunes en stage et en alternance sera développée. Le secteur associatif agissant sur l’inclusion et l’intégration sera soutenu.
– Le développement des campus des métiers et des qualifications, pour la formation et l’insertion professionnelle des jeunes dans les territoires, sera poursuivi et intensifié. - Les établissements d’enseignement supérieur, en lien avec le réseau des Pôles étudiants pour l’innovation, le transfert et l’entrepreneuriat (PEPITE) et en appui sur les Campus des métiers et des qualifications, proposeront une formation et un accompagnement aux jeunes décrocheurs, diplômés et non diplômés de l’enseignement scolaire, qui souhaitent créer leur propre activité :
– les jeunes sans diplôme pourront ainsi accéder au diplôme d’université créateurs d’entreprises (DUCA) ;
– les jeunes titulaires du baccalauréat pourront bénéficier du statut national d’étudiant- entrepreneur.
[Mesure 9]
Une action en faveur des publics les plus fragiles
- Les enfants en situation de pauvreté seront pris en compte de manière renforcée.
Alors qu’aujourd’hui plus d’un enfant sur cinq grandit dans un ménage vivant sous le seuil de pauvreté, l’Éducation nationale doit concilier une logique d’intervention collective à l’échelle des établissements scolaires et une capacité à accompagner individuellement les enfants les plus fragiles en lien avec les services de l’Aide sociale à l’enfance. C’est pourquoi le financement des fonds sociaux sera porté à 45 M€ (soit une augmentation de plus de 20 %) afin d’apporter des réponses financières immédiates à la situation d’élèves en difficulté. C’est aussi le sens de la mobilisation accrue qui sera engagée en faveur de la scolarisation des enfants de moins de 3 ans, qui permet une socialisation précoce d’autant plus profitable à l’enfant qu’il est fragile au plan social. Enfin, une suite déterminée sera apportée aux préconisations de la mission “grande pauvreté et réussite scolaire” confiée à M. Jean-Paul Delahaye, inspecteur général de l’Éducation nationale. - Une aide en faveur des départements d’outre-mer les plus défavorisés sera mise en place. Un fonds social spécifique cantine sera créé pour permettre aux collégiens et lycéens de Guyane et de Mayotte de bénéficier d’une restauration scolaire leur permettant de poursuivre leur scolarité dans de bonnes conditions.
- Les risques de repli chez les jeunes, pouvant représenter un danger pour eux-mêmes et pour la vie collective, seront mieux repérés.
Les chefs d’établissement recevront une formation renforcée à la détection des signes précurseurs des pratiques de repli et de radicalisation.
L’instruction à domicile fera l’objet d’un contrôle renforcé, impliquant des équipes pédagogiques en appui aux corps d’inspection effectuant actuellement les contrôles. À cette fin, des professeurs seront missionnés pour venir en appui aux corps d’inspection effectuant actuellement ces contrôles. Des repères seront donnés afin de mieux évaluer la progressivité des apprentissages. - Une mobilisation en faveur de l’enseignement pour les jeunes ayant commis un acte de délinquance et placés sous main de justice sera engagée à travers :
– la désignation d’un référent “justice” au sein de chaque établissement, chargé de faire le lien avec les services du ministère de la justice en charge du suivi social et éducatif des jeunes placés sous main de justice et toujours scolarisés ;
– l’intégration du développement des compétences sociales et civiques dans le parcours de formation des mineurs détenus, ainsi que la conduite d’actions spécifiques sous forme de parcours thématiques ou de participation à des concours. - L’offre de formation, la préparation aux examens et des cours d’acquisition des compétences fondamentales en faveur des jeunes détenus seront développés.
Mobiliser l’enseignement supérieur et la recherche
Comme l’ont montré les travaux du comité pour la Stratégie nationale de l’enseignement supérieur et ceux en cours de la Stratégie nationale pour la recherche, les enjeux de promotion des valeurs de la République et de la laïcité concernent tout autant l’enseignement supérieur et la recherche que l’enseignement scolaire. La cohésion de la population française repose sur la capacité de notre système d’enseignement supérieur et de recherche à être un lieu de réussite et de promotion sociale pour le plus grand nombre.
[Mesure 10]
Mobiliser l’Enseignement supérieur et la Recherche pour éclairer la société dans son ensemble sur les fractures qui la traversent et sur les facteurs de radicalisation
- Mieux rassembler et valoriser les recherches réalisées et en cours afin d’éclairer le débat public sur les questions relatives à la radicalisation.
- Solliciter l’Agence nationale de la recherche (ANR) pour renforcer le soutien aux travaux relatifs aux causes de la radicalisation dans les sociétés contemporaines.
- Au niveau européen, orienter les financements de la recherche vers les thématiques précédemment mentionnées, en favorisant la constitution de réseaux de chercheurs européens.
- Toujours dans le cadre européen, appuyer les initiatives collectives comme celle de l’European Alliance for the Social Sciences and the Humanities et introduire au sein du programme de l’European Social Survey (enquête européenne) des questionnements permettant d’alimenter les recherches sur la représentation sociale des phénomènes religieux.
- Inciter l’Institut universitaire de France (IUF) à mieux prendre en compte dans ses critères de recrutements les thématiques de recherche relatives au risque de radicalisation.
- Définir avec le réseau français des instituts d’études avancées, une politique de recrutement de chercheurs étrangers invités permettant de réunir un panel aussi large que possible d’expertises internationales.
- Créer des emplois d’enseignants chercheurs et de chercheurs dans les “disciplines rares” lorsqu’elles correspondent à un thème identifié comme prioritaire, conformément aux préconisations du Livre blanc des études françaises sur le Moyen-Orient et les mondes musulmans.
[Mesure 11]
Renforcer la responsabilité sociale des établissements d’Enseignement supérieur
- Valoriser les parcours professionnels et technologiques du lycée au master en multipliant les passerelles et en favorisant la mobilité des étudiants concernés grâce à Erasmus +.
- Mieux former les enseignants du supérieur aux enjeux de laïcité, de lutte contre les discriminations, le racisme et l’antisémitisme :
– Créer sur la plateforme FUN, une formation en ligne (MOOC) sur la lutte contre les discriminations, le racisme, l’antisémitisme ;
– Développer les actions de formation continue des personnels du supérieur (incluant les enseignants) sur ces sujets. - Renforcer les outils à disposition des établissements :
– Rappeler à l’ensemble des membres de la communauté universitaire, dans les formes qui paraîtront les plus adaptées au sein de chaque établissement, les règles applicables dans le supérieur en matière de laïcité et de lutte contre les discriminations, en se fondant notamment sur la Charte de la laïcité ;
– Désigner un référent “racisme et antisémitisme” au sein de chaque établissement. - Renforcer le lien social sur les lieux de vie et d’étude :
– Développer le soutien aux projets étudiants dans les domaines artistiques ou sportifs, destinés à lutter contre les discriminations et à promouvoir le “vivre ensemble”, par l’intermédiaire du réseau des oeuvres universitaires et scolaires (soutien aux projets culturels par le prix “Cultur’Action”), du soutien ministériel et des crédits décentralisés des Fonds de solidarité et de développement des initiatives étudiantes (FSDIE) ;
– Encourager la reconnaissance (dans le cadre des crédits ECTS) des compétences acquises par les étudiants lors d’engagements citoyens en rapport avec la lutte contre les discriminations ;
– Favoriser l’organisation de débats contradictoires sur les campus, à l’initiative des étudiants ou des établissements ;
– Favoriser le développement du lien social entre les universités et leur environnement immédiat, notamment lorsque celui-ci est situé dans des quartiers en difficulté. Cette mesure sera mise en œuvre avec le ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports. - Développer l’accès aux études supérieures pour les publics en difficulté :
Encourager la poursuite d’études supérieures des jeunes incarcérés, par le développement des conventions entre les universités, les directions inter-régionales des services pénitentiaires (DISP) et les unités pédagogiques inter-régionales (UPR). - Participer pleinement au service civique universel, en développant les missions de service civique au sein d’associations à l’université, et en facilitant les dispositifs de césure dans les parcours universitaires.
Tags : République, autorité, inégalités, laïcité
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