Suite à l’accord historique conclu avec l’ensemble des acteurs de la communauté universitaire sur la nouvelle organisation du master, Najat Vallaud-Belkacem a accordé un entretien au journal Les Échos le 4 octobre 2016.
Les universités vont désormais pouvoir choisir leurs étudiants à l’entrée en master et en refuser certains pour des questions de niveau ou de place…
Oui, absolument. Elles pourront subordonner l’admission en master au succès à un concours ou à l’examen du dossier du candidat. Ce sera l’objet de l’article L 612-6 du code de l’éducation. Mais ce même article se poursuit par la deuxième jambe du dispositif : s’ils en font la demande, les titulaires du diplôme de licence qui ne sont pas admis dans le master de leur choix se verront proposer une inscription dans un autre master qui tient compte de leur projet professionnel et de l’établissement dans lequel ils ont obtenu leur licence, dans des conditions qui seront fixées par décret.
Avec cette réforme, aucun étudiant souhaitant poursuivre ses études en master ne sera sans solution, sans choix, sans droit.
C’est donc la fin de la sélection entre la première et la deuxième année de master…
Oui, c’est là un progrès considérable : notre réforme va permettre d’avoir enfin un master en quatre semestres, conformément aux attendus de la réforme de Bologne de 2002. Et éviter à des jeunes de se heurter au mur de la sélection incomprise entre la première et la deuxième année de master. Nous maintenons de façon transitoire une exception pour le droit et la psychologie en raison des spécificités de ces deux secteurs liées à des concours qui sont au niveau bac+4. Sur la filière psychologie, une réflexion générale est nécessaire pour tenir compte de son lien avec une profession réglementée.
Les principaux acteurs de la négociation autour du master ont donc accepté l’idée du droit à la poursuite d’études pour tout étudiant diplômé d’une licence…
Absolument, c’est une avancée majeure. Nous le devons à une méthode de travail renouvelée et un dialogue constructif auquel ont contribué les acteurs et je les en remercie. Ce faisant, nous introduisons dans la loi une notion qui n’existait pas jusque-là : celle d’un droit reconnu à tous les jeunes de poursuivre leurs études jusqu’au plus haut niveau. Et ce droit sera garanti par l’État qui ne laissera pas l’étudiant seul face à un système universitaire parfois complexe.
Lorsque un étudiant titulaire du diplôme de licence n’aura reçu aucune proposition d’admission répondant aux candidatures qu’il a faites dans des masters, il pourra faire valoir son droit à la poursuite d’études. Ce droit peut être immédiat – dans l’année universitaire qui suit sa licence – ou différé si, et seulement si, l’étudiant décide de prendre une année de césure. Il fallait s’assurer que le fait de prendre une année de césure ne fasse pas passer les étudiants à côté de ce droit à la poursuite d’études qu’on leur garantit.
Que signifie concrètement ce droit à poursuite d’études ?
C’est le recteur de la région académique dans laquelle se trouve l’étudiant qui applique ce droit. Ce recteur devra faire trois propositions à l’étudiant qui souhaite poursuivre en master, dont au moins une proposition concernera l’établissement dans lequel l’étudiant aura obtenu sa licence ou à défaut un établissement de la région. Ces propositions devront offrir, dans la mesure du possible, une mention compatible avec le projet professionnel de l’étudiant.
Pour éviter d’envoyer en master de sciences un étudiant qui aurait une licence de droit…
Oui. Le recteur a un rôle de médiateur en fait. Car c’est lui qui va amener les établissements à proposer des solutions. Mais il a aussi un rôle très important d’anticipation en amont sur les capacités d’accueil des établissements, par le dialogue qu’il instaure avec ces établissements. L’idée étant que ces derniers ne se mettent pas, par exemple, à réduire leurs capacités d’accueil ou leur offre de master. C’est un engagement fort qui a été pris par la Conférence des présidents d’université (CPU).
Certes, les universités sont autonomes pour fixer les capacités, mais le recteur est positionné comme le garant que l’offre d’ensemble des masters assure la réalité du droit à la poursuite d’études. Cette réforme n’est pas une réponse malthusienne à la difficulté d’accueillir plus d’étudiants car il existe suffisamment de places en master aujourd’hui pour accueillir les diplômés de licences qui le souhaitent. C’est une réforme de bonne organisation pour les universités et de bonne orientation pour les étudiants.
Avez-vous finalement retenu l’idée d’une plateforme d’information pour les étudiants diplômés de licence ?
Nous allons effectivement lancer un site internet – dont l’adresse sera www.trouvermonmaster.gouv.fr – pour assurer que tous les étudiants aient l’information utile sur les filières, la description des pré-requis, les modalités pour déposer leur candidature, le détail des parcours, les capacités d’accueil, etc. Par ailleurs, en amont de cela, l’accompagnement personnalisé qui existe actuellement en licence sera davantage mobilisé pour aider les étudiants à élaborer leur projet de poursuite d’études. Nous modifierons donc pour cela l’arrêté sur la licence.
Dans le cadre du droit à poursuite d’études, y aura-t-il une aide financière pour l’étudiant auquel on proposerait un master éloigné de son établissement d’origine ?
Il y aura bien une aide à la mobilité. Nous avons décidé de mettre en place un fonds spécifique d’aide à la mobilité qui pourra se traduire soit par une bourse, soit par une prime d’installation. Nous sommes en train de travailler sur les modalités exactes. Cette aide se fera évidemment sur critères sociaux, mais qui seront plus larges que ceux des bourses étudiantes.
Pourquoi cet accord sur le master a-t-il pu enfin aboutir ?
Cela doit beaucoup à la méthode de négociation. De nombreux échanges avec toutes les organisations représentatives ont eu lieu depuis mai. On a pu trouver un accord parce qu’on n’a pas cherché à imposer une approche d’un clan contre un autre : cette logique aurait été vouée à l’échec, on l’a vu pendant 14 ans. On a beaucoup écouté et échangé avant de proposer un compromis.
On a installé un compromis à l’allemande qui repose sur la maturité et la volonté de ceux qui ont négocié. Alors même qu’il y avait de très grosses divergences entre les organisations. On les a reçues une par une, et le ministère s’est posé en arbitre. Cette méthode d’un dialogue social exigeant montre son efficacité et nous met pour l’avenir sur la voie de ce qui peut fonctionner. Cela signifie aussi que cet accord qui a été trouvé par la communauté universitaire ce mardi, et qui doit être confirmé au CNESER du 17 octobre, pourra difficilement être défait par la suite.
Retrouvez plus d’informations sur l’accord conclu le 4 octobre 2016
Alors, justement, quel peut être le véhicule législatif pour porter cette loi et faire en sorte qu’elle soit applicable à la rentrée 2017 ?
Il nous faut examiner les différentes possibilités. La proposition de loi du sénateur Jean-Léonce Dupont (UDI, NDLR) peut être un vecteur s’il accepte qu’un amendement gouvernemental apporte, au sein de son texte, la solution qui aura été trouvée par la communauté universitaire. Elle a l’avantage de la rapidité.
Vous aviez pourtant montré beaucoup de réticences sur ce texte !
Parce qu’à l’origine, son texte instaurait en guise de réponse à la problématique que nous connaissons – et dont vous voyez bien la complexité – la sélection comme seule et unique réponse. La vraie nouveauté aujourd’hui, c’est que nous avons une réponse qui marche sur ses .deux jambes, et chacun a fait un pas vers l’autre. C’est le succès de notre méthode : ne pas avoir choisi un camp contre un autre. Ce consensus de l’ensemble de la communauté universitaire est extrêmement important car cela veut dire que sur l’ensemble de l’échiquier, tous les acteurs vont s’approprier le texte et le faire leur. C’est un progrès énorme. Pour la suite, ce qui m’importe c’est l’efficacité. Je souhaite que le texte soit adopté dans les meilleurs délais.
Existe-t-il d’autres options ?
Celle d’une proposition de loi socialiste, bien sûr. Mais avec des incertitudes sur le calendrier si nous voulons que la réforme voie le jour dès la rentrée 2017.
Propos recueillis par Marie-Christine Corbier pour les Échos.
Photo © Philippe Deveray / MENESR
Tags : Master, université, étudiants
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Ayez au moins la correction de répondre à mon mail.. ma fille de 21 ans passe au tribunal administratif ce 14 octobre pour tenter un recours que l université de toulouse capitole lui refuse alors que son master 2 n est pas dans le décret qui prévoit une sélection. Elle n a aucune autre solution… signé: une maman désespérée qui n en peut plus de voir sa fille dépérir en ne sachant pas ce qu elle va devenir .
Bravo pour cet accord ! Mais vous risquez d’être surprise par la réaction des étudiants élitistes pour ce qui est du dispositif d’entrée en Master 1.
Qu’en est-il autrement des étudiants non retenus cette année en Master 1, ayant obtenu un accord de césure mais dont le responsable de master refuse de signer le contrat pédagogique et bloque ainsi l’inscription ?
C’est le cas notamment de mon épouse.
Mme le ministre ma fille a obtenu son bac pro commerce avec 11,79 de moyenne générale celle ci recherche un Lyce dans la région lilloise en BTS MUC et impossible de trouver une place même en alternance elle a une place a IFSAC mais pas moyen de trouver un stage de professionnalisation car toutes les magasins ne veulent prendre de stagiaiaires que faire merci de me répondre bonne soiree