Les français valent mieux que ce que les débats, clashs et buzz médiatiques permanents semblent dire

Questions de société Divers Infographies Publié le 4 mars 2019

On vous le dit et le répète à longueur de journée, et la dernière étude internationale menée par nos collègues d’IPSOS Mori vient malheureusement le confirmer: la plupart des Français entretiennent un rapport négatif, voire très négatif avec l’immigration. France, pays du repli… nous pourrions nous en arrêter là, pour nous lamenter (ou nous réjouir, mais vous devinerez aisément que ce n’est pas mon cas), mais cette étude nous ouvre d’autres pistes de réflexions à mon sens plus fécondes. Et si les Français ne correspondraient pas tant que ça à la caricature que l’on en fait parfois? Question provocatrice au regard de l’air du temps, et pourtant… Quand on regarde les données internationales, non pas en termes absolus mais en comparaison avec les autres pays, on constate que les Français sont ceux qui – dans leurs perceptions, sinon en réalité – sont en effet parmi les peuples qui expriment le plus manifestement un vécu quotidien de la « diversité » sous toutes ses formes.

Ils sont parmi les moins enclins à dire que la plupart de leurs amis font partie du même groupe ethnique qu’eux (49% disent que plus de la moitié de leurs amis sont du même groupe ethnique, contre 62% des britanniques par exemple); parmi les moins enclins à estimer que la plupart de leurs amis partagent leurs croyances religieuses (30% disent que plus de la moitié de leurs amis sont de mêmes croyances, contre 48% des italiens par exemple); parmi les moins enclins à dire s’entourer d’amis de même niveau d’éducation (34% ont plus de la moitié de leurs amis de mêmes niveaux d’éducation, contre 46% en Grande Bretagne); les moins enclins à ne côtoyer que des personnes proches de leurs idées politiques (23%, contre 32% en Grande Bretagne, et jusqu’à 44% en Hongrie ou 46% en Russie), ou encore les moins susceptibles d’avoir une majorité d’amis partageant leurs idées sur l’immigration (33%).

L’entre-soi – social, idéologique, religieux… – serait-il donc moins fort en France que chez la plupart de nos voisins? Il est évidemment possible que nous surestimions, dans nos perceptions et nos déclarations, notre expérience de la diversité. Mais cette hypothèse me semble difficile à expliquer: pourquoi serions-nous donc plus enclins à vouloir apparaître “ouverts” et “tolérants” aux yeux des enquêteurs que, par exemple, nos voisins italiens, britanniques, ou espagnols? Ce sujet mérite en tout cas d’être creusé, tant il est crucial pour réapprendre à fabriquer du collectif et apaiser les tensions qui parcourent notre société. Tout responsable politique sait qu’il est facile de créer des dynamiques sur des émotions négatives – l’envie, la peur, le rejet, l’ignorance, le mépris sont autant de moteurs que l’on active allègrement dans les campagnes électorales. Bien plus ardue est la tâche pour ceux qui cherchent à créer du lien, de l’empathie, de l’espoir – un espoir qui ne soit pas égoïste…

Cet article reprend la série “Crossing Divides” de la BBC, qui s’appuie elle-même sur des données de l’institut de sondages Ipsos. Pour en savoir plus: https://www.bbc.com/news/world-47403809