Pédophilie : un an après l’affaire Villefontaine, rarement autant aura été fait – Entretien au Dauphiné Libéré

Éducation nationale Publié le 24 mars 2016

Un an après la découverte de l’affaire de Villefontaine, dans le Nord Isère,  la ministre de l’Éducation nationale est revenue lors d’un entretien au Dauphiné Libéré sur l’ensemble du travail réalisé pour protéger les enfants d’autres cas de pédophilie à l’école.

Il y a un an, l’affaire de Villefontaine éclatait. La promesse était faite d’adopter une loi avant l’été afin d’obliger les parquets à informer le ministère de l’Éducation nationale des condamnations. Un an après, cette loi n’a toujours pas abouti. Pourquoi ?

Vous vous en souvenez, avec la Garde des Sceaux, Christiane Taubira, nous avions dit aux familles qu’il fallait modifier la loi pour établir un régime clair et sécurisé d’échanges d’informations entre la justice à l’éducation nationale , et plus globalement, à toutes les administrations publiques. C’est ce que préconisait le rapport d’enquête que nous avions demandé à nos inspections générales dès le drame de Villefontaine connu. Et c’est bien ce que nous avons fait : le 24 juin, un amendement était présenté à l’Assemblée nationale pour rendre obligatoire la transmission par les procureurs des condamnations affectant des personnes travaillant en contact avec des mineurs.  Malheureusement, après l’adoption définitive le 23 juillet par le Parlement, le Conseil constitutionnel a censuré l’article jugeant qu’il n’avait pas sa place dans le projet de loi. Nous avons donc entièrement repris la procédure législative, et présenté un projet loi globale permettant de traiter les dysfonctionnements graves apparus à Villefontaine. Nous sommes désormais au terme de la procédure législative puisque la Commission mixte paritaire s’est accordée sur un projet hier. Nous pouvons désormais espérer publication de cette loi essentielle dans les toutes prochaines semaines.

Depuis un an, quelles ont été les différentes mesures ou les procédures adoptées par les deux ministères en terme de transmission d’informations ? Pouvez-vous nous les détailler ?

Le rapport des inspections générales a émis une quinzaine de propositions pour améliorer la transmission d’informations entre la justice et l’éducation nationale. Nous avons donc méthodiquement pris les décrets et circulaires nécessaires à leur mise en œuvre. Dès le mois d’avril 2015, nous avons réuni recteurs et procureurs généraux afin qu’ils échangent et travaillent ensemble. A la rentrée de septembre 2015, nous avons pris une circulaire conjointe aux deux ministères afin de réorganiser nos services. Des référents justice ont été désignés dans tous les rectorats, et des référents éducation nationale dans tous les tribunaux de grande instance afin de garantir une bonne transmission des informations. Ces référents ont été formés en décembre. Nous avons aussi revu les procédures de signalement et d’alerte afin qu’elles soient plus efficaces. Nous avons publié un guide méthodologique et mis en en place un outil de partage d’informations sécurisé pour garantir la confidentialité des données. Et puis, je m’y étais engagée devant les familles, j’ai mis en place avec mes services un contrôle d’une ampleur inédite des casiers judiciaires de tous les agents du ministère travaillant en contact avec des mineurs. une procédure est en place et elle comporte évidemment les garanties nécessaires au respect des droits des personnels de l’Education nationale, en lien avec la CNIL. Les décrets ont été publiés en début d’année et nous avons pu débuter le contrôle dans une première académie. Ce contrôle s’est bien déroulé, nous allons maintenant procéder à un contrôle global académie après académie afin de nous assurer qu’aucune autre affaire Villefontaine ne puisse se produire. Rarement autant aura été fait. Et je tiens à saluer ici la grande dignité dont ont fait preuves les familles des victimes de Villefontaine : dans mes rencontres avec elles, les familles ont toujours eu à cœur de défendre les changements de législation et de pousser l’État à tirer toutes les leçons pour la suite.

Ce mardi 22 mars, un nouveau projet de loi a été rapporté à l’Assemblée par le député Erwann Binet. Certaines concessions ont été faites par rapport au projet initial. Qu’en pensez-vous ?

La loi définit pour la première fois un cadre juridique clair et sécurisé. C’est une avancée très importante et c’est ce que je voulais. Désormais, lorsque les procédures portent sur des infractions sexuelles, violentes ou commises contre des mineurs, le procureur de la République a l’obligation d’informer l’administration lorsqu’il s’agira d’une condamnation, y compris si elle n’est pas encore définitive, ou lorsque la personne, placée sous contrôle judiciaire, est soumise à l’interdiction d’exercer une activité impliquant un contact habituel avec des mineurs. Une faculté d’information est également reconnue au ministère public en amont de la condamnation. Voilà ce qui manquait. La Commission mixte paritaire a décidé que le procureur n’avait pas à informer au stade de la garde à vue mais au stade de la mise en examen, qui intervient en général dès la sortie de garde à vue, dans des affaires aussi graves. Je ne le cache pas, j’étais favorable à la possibilité de communication dès la garde à vue, le Parlement a tranché. Je comprends les arguments avancés, cette disposition ne change pas l’essentiel, de véritables garanties sont apportées par la loi pour éviter une nouvelle affaire Villefontaine. Et le ministère est pleinement mobilisé pour mettre en œuvre ces nouvelles dispositions.

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Un commentaire sur Pédophilie : un an après l’affaire Villefontaine, rarement autant aura été fait – Entretien au Dauphiné Libéré

  1. Benaqqa Nidal

    On va dans le bon sens mme la ministre,mais toujours aucun protocole n’a eté crée pour faire face à ce genre de drame….c’est le dernier coup de collier à mettre pour que nous parents-victimes nous soyons totalement satisfait de vos actions

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