Alors que le ministère de l’éducation nationale publie, mercredi 30 mars, ses indicateurs de valeur ajoutée des lycées, Najat Vallaud-Belkacem a donné sa vision du lycée au journal Le Monde.
Le Monde : Vous rendez publics ce mercredi les « indicateurs de valeur ajoutée des lycées » (IVAL), une publication devenue rituelle depuis le milieu des années 1990. Est-ce que la conception d’un « bon lycée » a changé ? Quelle est la vôtre ?
Najat Vallaud-Belkacem : Un bon lycée est un lycée qui accompagne ses élèves depuis la classe de seconde jusqu’à l’obtention du baccalauréat. Il part de la réalité de ses élèves, de ce qu’ils sont, leurs lacunes, leur milieu, et parvient à déjouer les déterminismes. C’est tout l’intérêt de ces IVAL : permettre d’évaluer la capacité d’un établissement à garder ses élèves, à les conduire jusqu’en terminale et à leur faire réussir l’examen. Elle est là la vraie performance, et elle n’est pas à rechercher nécessairement en centre-ville.
Un « bon » lycée, pour beaucoup de familles, rassemble simplement de « bons » enseignants…
Il y a là comme une évidence : ce qui fait un « bon » lycée ce sont d’abord de « bonnes » équipes – les enseignants mais aussi tous les personnels : ceux de direction, de santé, d’encadrement, d’orientation… Les indicateurs publiés aujourd’hui permettent de rendre compte, noir sur blanc, de l’engagement de toute une équipe, en saluant celles qui ont été capables de penser leurs pratiques collectivement.
Ces indicateurs de réussite sont publiés alors même que se tient, ce mercredi, la journée de l’innovation enseignante à Paris. Faites-vous un lien entre performance et innovation ?
Ce n’est pas un hasard : les initiatives pédagogiques innovantes, lorsqu’elles sont portées collectivement, créent une dynamique et sont génératrices de performance. Par exemple, les lycées qui ont beaucoup innové contre le décrochage scolaire obtiennent des résultats particulièrement intéressants. Preuve pour ceux qui en doutent qu’aider les plus fragiles sert l’ensemble des élèves.
Les lycées ont connu une réforme importante avant que la gauche n’arrive au pouvoir. Elle a nécessairement eu un impact sur leurs pratiques et leurs résultats. Où en est-on de l’évaluation de la « réforme Chatel » ?
Le bilan a été engagé depuis plusieurs semaines avec les partenaires sociaux, les parents d’élèves et les organisations lycéennes. Il permettra de voir les améliorations à apporter. D’ores et déjà, nous avons pris des mesures concernant les lycées professionnels : période d’accueil en seconde professionnelle, préparation aux stages, possibilité de revoir son orientation jusqu’aux vacances de la Toussaint en changeant de filière professionnelle… Côté lycéens, nous avons revu les modalités du dispositif APB pour améliorer leur information et leur insertion dans l’enseignement supérieur.
Vous mettez l’accent sur de « bonnes » équipes. A quand une « bonne » rétribution ?
Rien ne justifie que les enseignants français soient en moyenne moins bien rémunérés que leurs homologues européens – particulièrement les professeurs des écoles. Je reconnais volontiers qu’on a beaucoup demandé aux enseignants depuis 2012. Les réformes structurelles qu’on a introduites dans le système scolaire (développement de la scolarisation des enfants de moins de 3 ans, « plus de maîtres que de classes », nouveaux rythmes, réforme du collège, nouveaux programmes à venir…) : tout cela induit de nouvelles façons de travailler et des réorganisations importantes pour eux. Dans le même temps, sur chacun des défis que notre société doit affronter – prévenir la radicalisation, faire vivre la laïcité, lutter contre le harcèlement… – on attend beaucoup de nos enseignants.
Pour moi, c’est un devoir que de les revaloriser. C’est même le chantier prioritaire du moment. J’essaie d’obtenir le meilleur arbitrage possible, dans le contexte budgétaire actuel. Je me suis fixé comme horizon début mai, avec l’organisation de deux journées lors desquelles nous ferons un point d’étape de la refondation de l’école. Car la refondation de l’école, c’est aussi ça : des enseignants remis au centre de la cité.
Retrouvez ici les indicateurs de valeur ajoutée des lycées.
Propos recueillis par Mattea Battaglia pour Le Monde.
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Comme d’habitude, on ne fait aucune évaluation critique des dispositifs et on se gargarise de mots…. Comment expliquez-vous que, dès le 2ème trimestre, on propose à des élèves de Seconde générale une orientation en voie technologique alors que ces élèves veulent devenir médecins? Comment expliquez-vous que l’on mente autant aux jeunes en les ramenant à la case départ et à leur déterminisme social puisque, certes, ils sont au lycée mais n’ont aucun moyen d’y réussir? Foutaises, foutaises, foutaises….